1. Un 14 juillet bleu blanc sexe


    Datte: 07/05/2025, Catégories: fh, piscine, hotel, anniversai, amour, portrait, Auteur: Amarcord, Source: Revebebe

    ... débarrassé de la chape de plomb des bigots pour se faire écraser ensuite par un esprit moralisateur aussi léger qu’un plan quinquennal. C’est peut-être bien là qu’ils ont tout foiré, les Russkofs : c’est sur l’arsenal sexy qu’ils ont perdu la guerre froide. Ça manquait plus de jolies gambettes que de séniles pardessus, leur vitrine populaire. Les chapeaux mous et bottes de fer moscovites, c’était quand même moins excitant que les chapeaux melons et bottes de cuir, surtout quand elles s’élevaient vers les cuisses de Joanna Lumley, pas vrai ?(1) D’ailleurs, elle en avait mis des bottes, ce jour-là, Marianne. Et puis une jupe aussi, le genre de celles qui vous font goûter pleinement le retour du printemps. Ils ne devaient pas s’emmerder, les camarades à la banderole prolétarienne, juste derrière nous, en marchant avec la trique finale.
    
    — Et puis, toi, tu sembles déjà fossilisé à 28 ans, me reprochait-elle. Tu ne crois en rien. Comme les vieux cons.
    — T’es injuste pour les vieux cons. Regarde Paco Rabanne : il croit dur comme fer que la glorieuse station Mir va nous ratatiner la tronche dans trois mois.
    — Et tu y crois, toi aussi ?
    — Bien sûr ! En tout cas, ça a toutes les chances d’arriver avant la révolution, à mon humble avis.
    — Alors pourquoi tu défiles avec moi ? Y’a pas de temps à perdre, à t’entendre…
    — C’est exactement la raison de ma présence ici.
    — C’est-à-dire ?
    — Je suis favorable à l’union des prolétaires. Il y a urgence.
    
    Le clin d’œil fut franchement ...
    ... appuyé, histoire d’assaisonner d’un peu de dérision l’allusion assez lourdaude. Elle ne releva pas autrement qu’en levant les yeux au ciel. Pas de place pour la négociation. Tant pis, ce n’était qu’un pauvre début, mais je continuerais mon combat.
    
    Marianne, je l’avais rencontrée quelques semaines plus tôt, via un copain commun aux convictions solidement ancrées à la gauche de la gauche. Et je fus aussitôt séduit. Un visage harmonieux encadré de cheveux bruns, de grands yeux ouverts sur le monde, des lèvres pleines et joliment dessinées, un charme évident qu’elle semblait ignorer ou même décourager en refusant toute afféterie. En vain : cette douceur-là, elle ne pourrait jamais la dissimuler sous ses principes bien tranchés. Pas si cohérents d’ailleurs, à en juger par la jupe. Je lui trouvai une ressemblance avec l’actrice d’un film sorti quatre ou cinq ans plus tôt :Trois Couleurs : Rouge. Décidément, on n’en sortait pas. Je n’étais pas devenu trotskyste, comme elle, mais Marianniste. Je ne rêvais pas du grand soir, mais de la nuit qu’elle m’inviterait peut-être à passer dans son lit, si j’étais un bon petit soldat du peuple.
    
    Leur groupe trotskyste, je n’y comprenais que pouic. Ce qu’ils faisaient, ce qu’ils disaient, leur culte du secret, leurs dogmes, leurs dissensions, leurs anathèmes, leurs excommunications. «Quand deux trotskistes se rassemblent pour former une organisation, un troisième les rejoint pour faire un schisme, » m’avait confirmé en riant Marianne, ce qui ...
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