Accident de parcours
Datte: 18/10/2023,
Catégories:
fh,
Oral
pénétratio,
Auteur: Arpenteur, Source: Revebebe
La retraite à soixante-quatre ans, qu’ils disaient ! Je suis encore bien loin de les avoir. Pourtant, cela fait de nombreux mois que je suis en inactivité. À cinquante-huit ans, la boîte dans laquelle j’avais fait carrière voulait se débarrasser de mézigue. Quelques pénibles tractations plus loin, nous avons trouvé un accord, financièrement acceptable, même si c’était sans compter sur l’inflation galopante.
J’en ai profité pour me réfugier à Montboudif, petit village isolé du Cantal qui a la particularité d’avoir vu naître un de nos présidents, Georges Pompidou, ainsi que le célèbre sculpteur Louis Chavinier qui fut promu en son temps Chevalier de l’Ordre des Arts et des Lettres. Bien maigre consolation que tout ça, car le village est moribond et la population ne cesse d’y décroître.
Nous y possédions une maison familiale. Au décès de ma mère, mes gentilles sœurs souhaitaient s’en séparer, c’est tombé pile-poil avec la période de mon licenciement. J’avais besoin de calme et de tranquillité, je suis un gars de la campagne, j’ai horreur du brouhaha et de la circulation, j’ai décidé de racheter leurs parts et de m’exiler là-bas. Qui plus est, cette vieille bâtisse, un peu à l’écart de la commune, recèle pour moi d’incroyables trésors, car le grenier est rempli d’un foutoir indescriptible, héritage de nombreuses générations d’ancêtres originaires d’Italie ; un lointain aïeul avait émigré ici à la fin du dix-huitième siècle, en suivant Napoléon dans ses pérégrinations. Ceci ...
... dit, cela a été compliqué de l'acheter cette bâtisse, car mes chères sœurs sont des grippe-sous et il a fallu négocier pour chaque objet, pour les vieux meubles, pour l’horloge comtoise. Rien ne les intéressait, mais elles voulaient des compensations pour tout…
Le parc naturel régional des volcans d’Auvergne attire pas mal de tourismes l'été, nous ne sommes pas loin de Riom-ès-Montagnes, le barrage des Essarts rencontre également quelques succès, le musée Pompidou accueille quant à lui un public un peu plus ciblé. Toujours est-il que je suis fréquemment « dérangé » par quelques randonneurs, ou même par de simples visiteurs, qui passent sur le chemin en bas de chez moi. Certes, cela me fait un peu de compagnie, car je n’ai pas souvent l’occasion de parler à quelqu’un, échanger quelques mots avec des inconnus ne peut pas me faire de mal. Mais certains ne se gênent pas pour faire une razzia dans mon jardin, pommes, poires, fraises, framboises, cerises. J’ai la chance de posséder un beau verger où nombre de promeneurs se croient en libre-service, ce qui a tendance à m’exaspérer. Il leur suffirait de demander pour que mon jardin leur soit gracieusement ouvert, mais certains préfèrent chaparder en loucedé, ça me fait sortir de mes gonds. Comme le dit mon voisin Léon, un bon coup de chevrotine, c’est tout ce qu’ils méritent, ces bâtards, des malappris de la ville, comme il ne cesse de le répéter.
À partir de la rentrée scolaire, les touristes se font plus rares ; à mon tour de ...