Aïcha, ou les exils
Datte: 30/06/2019,
Catégories:
fh,
ff,
hotel,
anniversai,
amour,
confession,
historique,
Auteur: Asymptote, Source: Revebebe
... me sens bien disgracieuse. Monsieur Ferrad, si vous nous aviez rencontrés toutes deux il y a vingt ans, vous ne m’auriez pas même aperçue.
C’était excès de modestie, la jeune femme était splendide et rayonnait de jeunesse, de beauté et d’amour pour Claire. Mes préjugés me conduisaient à concevoir les Marocaines toutes identiquement grassouillettes, aux seins et fesses rebondis écrasant d’un corps dodu des cuisses massives. Cependant les préjugés sont faits afin qu’on s’en déjuge et Aïcha s’appliquait à démontrer l’incongruité du mien. Elle développait une stature fine et gracieuse, de belles rondeurs certes, mais dépourvues de tout excès, juste divinement attirantes. Son visage était un sourire rehaussé par des pommettes saillantes mordorées, des yeux profonds et luisants comme des braises, une bouche un peu large qui semblait appeler aux baisers. De magnifiques et longues boucles châtain foncé cascadaient autour de son cou gracile. Sa voix enfin était engageante et mélodieuse, si suave que toutes ses paroles se muaient en soyeuses caresses qui achevaient de la rendre irrésistible.
L’amour qu’elle portait à Claire éclatait dans chacun des gestes qu’elle lui prodiguait et des regards dont elle la couvait. Ils contenaient quelque chose de maternel et de protecteur, mais aussi de passionné. Elle serait à l’égard de ma fille, mère et épouse jalouse.
Une amabilité et une serviabilité parfaite complétaient le tableau. Très vite, je me surpris à envier Claire.
Son ...
... bambin, Quentin, parfaitement bien élevé, d’une drôlerie désopilante et d’une sagesse exemplaire subjugua Kadour, encore plus que sa mère et celui-ci retomba en enfance, se pliant aux caprices du chérubin. Elle m’offrit, en cet anniversaire, un coffret contenant trente aquarelles peintes de sa main représentant des paysages, des villes, des fantasias, des scènes de la vie rurale du Maghreb.
Rien ne pouvait me faire plus plaisir, je la remerciai en l’embrassant et constatai que hors des atteintes du temps, elle fleurait… l’immuable Aïcha.
— Pourquoi donc ne faites-vous aucun portrait ?
— En guise de portrait, vous avez Kadour et m’aurez moi, belle-maman, sans compter votre miroir !
Ce fut dit avec tant de naturel et de gentillesse que cela me fit fondre. Le repas fut succession de plaisanteries et de rires, car elle sut convoquer le soleil intempérant du Maghreb à notre table. Aïcha expliqua qu’elle adorait son pays s’il n’y était le statut de la femme et qu’elle avait préféré divorcer plutôt que d’y suivre un époux, déjà autoritaire ici, qui voulait y retourner. Au dessert, les deux filles nous expliquèrent qu’Aïcha possédait un appartement dans le centre-ville qu’elle souhaitait rénover intégralement avant d’y installer sa « fiancée ». Claire nous demanda si pendant les travaux qui risquaient d’être longs, elles pourraient occuper toutes deux avec Quentin son ancienne chambre. Kadour immédiatement opina et proposa ses services pour les travaux qui pouvaient relever de ...