1. Quelqu'un dans mon genre


    Datte: 01/06/2019, Catégories: fh, voisins, amour, Oral nopéné, Humour Auteur: Marie Anne & Luc Carois, Source: Revebebe

    ... envie que tu le fasses rire, pas que tu le désespères…
    — J’en ai rien à foutre des désespérés. J’écris pour les réveiller.
    — Mais ILS N’EN ONT PAS ENVIE, fourre-toi bien ça dans le crâne.
    — Ouais… Ils veulent dormir paisiblement pendant qu’on leur attache des chaînes aux mains et aux pieds. Et après, ils veulent pouvoir pleurnicher en disant que c’est pas juste…
    — Tout le monde n’est pas comme toi, Nolant. Tout le monde n’a pas envie de se battre en permanence.
    — J’ai pas envie de me battre non plus… Je veux juste être libre et qu’on me foute la paix.
    — Alors je sais pas, moi… change de pays.
    — On n’emporte pas sa patrie à la semelle de ses souliers…
    — Tu fais chier ! Tu as écrit des trucs vachement biens, plus consensuels ; ça passerait mieux.
    — Ça m’intéresse pas. Les gens qui sont pas contents, je leur pisse à la raie.
    — Je ne pense pas que ce soit la fonction première d’un écrivain…
    — Qu’est-ce que tu en sais ? Tu es écrivain ?
    — Non, mais j’en connais pas mal, figure-toi. C’est mon métier… Ça fait vingt ans que j’organise des lectures dans ma librairie, et je sais ce que le public apprécie.
    — Et si le public apprécie, tu vends des bouquins et tu te fais du blé…
    — Eh bien oui, figure-toi… Je ne suis ni mécène, ni philanthrope : je fais mon métier, et je le fais pour gagner de l’argent, comme tout le monde.
    — Pour avoir une grosse bagnole et payer des vacances à Ibiza à ta femme…
    — Ben ouais !
    — Mon dernier bouquin est un recueil de poésies. C’est lui que ...
    ... je présenterai, ou alors trouve-moi un remplaçant.
    — Oh, ne la joue pas comme ça avec moi ! Des remplaçants, je passe trois coups de fil et j’en aurai sans problème.
    — Eh ben passe-les, tes coups de fils…
    
    Je raccroche en maudissant une fois de plus ce monde de lâches et d’entrepreneurs incapables de vivre pour la beauté du geste, obnubilés par le pognon et les apparences. Un monde empli de gens incapables de la moindre révolte, ne se mettant à gémir que lorsque leur tête se trouve entre le billot et la hache du bourreau, comme l’avait si bien écrit Khalil Gibran. Un monde à la moralité à géométrie variable et muni d’un quotient intellectuel de bisounours.
    
    Je ne vais donc pas participer à cette lecture publique, et par conséquent pas pouvoir assurer la promo de mon dernier bouquin. Mon éditeur va encore m’appeler et piquer une colère en prétendant que je n’y mets pas du mien, que j’aurais pu noyer le poisson en lisant des histoires anodines et en ne présentant que mes poésies à la vente. « Donner envie », c’est le nouveau leitmotiv à la mode… Donner envie, comme les putes, en susurrant des conneries comme« Viens, ma chérie… Tu vas la sentir, ma grosse poésie… »
    
    Je vomis dans le lavabo de la salle de bain, puis je prends une bière dans le réfrigérateur.
    
    J’allume l’écran de l’ordinateur et je consulte mes mails. De la pub pour duViagra, des relances de pétasses provenant d’un site de rencontres où je ne vais plus depuis des mois, des injures provenant d’un forum de ...
«1234...35»