La rédemption
Datte: 16/05/2019,
Catégories:
fh,
ff,
copains,
lettre,
Auteur: Lignière, Source: Revebebe
... devoir m’acheter une conduite, ou du moins une petite conduite. Mais rassure-toi, tu auras toujours tous les droits sur moi.
Je repensais à la première fois où nous avons fait l’amour ensemble. C’était en 1994 à Londres à l’hôtel Hempel, nous fêtions nos vingt-deux ans et nous avions rencontré au bar du sous-sol trois joueurs de rugby argentins bien dépités. Ils venaient de perdre leur match contre l’Angleterre, ils avaient même pris une piquette sévère. Ils étaient enragés et avaient décidé d’oublier leur déconvenue en asséchant les bars encore ouverts. Ils nous ont abordées et nous avons commencé un échange plutôt laborieux compte tenu de la pauvreté de notre espagnol. Eux, ne connaissaient de l’anglais que les motsbeer lager,ale. Nous avons fini par les laisser monter dans notre chambre. Ils ont immédiatement mis au point une tactique assez simple, deux cibles, deux hommes, le troisième assure le ravitaillement en bières et changement de poste à chaque arrêt de jeu. Plus tard dans la nuit, la fatigue se faisant sentir, ils se sont ravisés, trois hommes, une cible, la seconde se repose. Je me souviens allongée près de toi, avoir pris ta main alors que tu gémissais sous leurs assauts. À la mi-temps suivante, ils ne sont pas revenus sur le terrain, trop occupés à vider le réfrigérateur.
Nous nous sommes glissées sous les draps et juste avant de sombrer dans le sommeil, j’ai senti ta main sur mon ventre et le souffle de tes baisers sur mon épaule. À notre réveil, nos ...
... guerriers s’étaient repliés en bon ordre, sans doute en direction d’un pub qui venait d’être réapprovisionné. Nous sommes sorties pour nous restaurer et aussi pour permettre à la femme de ménage de remplir son office dans notre chambre qui tenait du champ de bataille. Le soir-même nous avons fait l’amour. Nous n’avons pas autant d’outils que nos compagnons mais nous savons tellement bien les utiliser. Le reste du séjour a été un vrai bonheur, nous étions amoureuses et comblées. Puis je suis partie, d’abord à Madrid, puis à Berlin et maintenant au Canada. Je ne sais pas où nous serons dans un an.
Et maintenant, vois-tu, j’ai envie de me poser, de construire quelque chose de solide et d’assurer mon avenir. Je ne peux pas me permettre de quitter Alain. Je n’ai aucune vocation à travailler et, en plus, je ne sais rien faire. Ce n’est pas mes études d’histoire de l’art qui vont me nourrir. Par ailleurs, mes goûts pour les jolies choses supposent des revenus confortables. Alain gagne bien sa vie, il héritera un jour de ses parents, moi des miens et nous aurons une vie aisée. Il n’a pas de goûts compliqués, il ne court pas les filles (hélas) et il a une pratique sexuelle quasiment anglicane. Que puis-je espérer de mieux. Cet enfant consolidera notre ménage, je vais apprendre à faire des confitures et à lireBabar avec le petit sur mes genoux.
Je suis triste. C’est tout un morceau de notre vie à toutes les deux qui se termine. J’espère que tu comprendras mes raisons. Continue, je ...