1. Rhapsody in blue - Première partie


    Datte: 17/04/2019, Auteur: Lilas, Source: Revebebe

    ... tête, et rencontre tes yeux adoucis.
    
    – De quoi veux-tu parler ?
    
    – Je ne sais pas…
    
    Je garde le silence. Puis je dis, d’une voix lente :
    
    – Je peux te réciter quelques vers, si tu veux.
    
    – Des vers ?
    
    –« Les formes s’effaçaient et n’étaient plus qu’un rêve, Une ébauche lente à venir, Sur la toile oubliée, et que l’artiste achève, Seulement par le souvenir… (1)» Tu aimes ?
    
    – C’est de qui ?
    
    – De Baudelaire.
    
    Tu sembles méditer mes paroles. Peut-être ne connais-tu pas Baudelaire.
    
    – Je ne savais pas que tu lisais de la poésie.
    
    – Tu ignores un tas de choses sur moi.
    
    – Pourquoi es-tu venue, Eva ?
    
    Mon cœur se serre. Notre conversation, de futile, devient grave et sérieuse. Pour prendre une contenance, je trace des cercles dans les poils bruns de ta poitrine nue, réfléchissant en même temps. Étrange que tes pensées aient suivi le même chemin que les miennes, ce soir.
    
    Sommes-nous donc vraiment liés par un invisible fil ?
    
    – Qu’est-ce que tu veux dire ? demandé-je.
    
    Tu pousses un soupir. Je me redresse et te dévisage. Ton regard se rive au mien, sombre et interrogatif.
    
    – Tu sais très bien… Pourquoi es-tu venue à Genève, chez moi ? C’est ce que j’aimerais savoir.
    
    – Ce n’est qu’aujourd’hui que tu te poses la question ? Je te croyais plus curieux.
    
    Tu as un léger sourire, et fermes un instant les yeux.
    
    – Je me suis déjà posé cette question, presque autant de fois que toi, je suppose. Mais aujourd’hui, je ne suis plus très sûr de la ...
    ... réponse.
    
    Pas de doute, la conversation devient vraiment sérieuse. Et à vrai dire, la tournure qu’elle prend ne me plaît pas trop. Même si je reconnais intérieurement que tu as raison de te poser ces questions. Ne me les suis-je pas posées moi-même au moins un millier de fois ? J’ai eu le temps d’y penser, depuis un mois et demi que je prépare mon voyage…
    
    – Pourquoi la réponse serait-elle différente aujourd’hui ? fais-je.
    
    Tu réfléchis quelques secondes avant de parler.
    
    – Parce qu’aujourd’hui ce n’était pas pareil… aujourd’hui tu as fait l’amour avec moi, réponds-tu d’une voix basse. Comme avant…
    
    Je me raidis. Veux-tu dire par là que je donne l’impression d’être venue dans ce seul but ? Comment peux-tu croire que j’avais prévu de faire une chose pareille ? Ma voix se fait coupante :
    
    – Si tu es en train de suggérer que cet « acte » était prémédité et que c’est pour cette raison que je suis venue à Genève, jesuggère à mon tour de te coller une gifle dont tu te souviendras longtemps. Et je repars illico presto en France !
    
    Incroyable mais vrai, tu éclates de rire. C’est bien rare ! Agacée, je m’assieds, et cherche des yeux quelque chose à me mettre sur le dos. Ne trouvant absolument rien dans les abords immédiats –où est mon pantalon ? mon slip ? ma chemise de nuit alors ? – je me glisse dans les draps d’un mouvement irrité. Une fois ton hilarité calmée, tu roules sur moi, et me fais un grand sourire. Léger et apaisant.
    
    – Ne sois pas si agressive, petite ...
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