1. Rhapsody in blue - Première partie


    Datte: 17/04/2019, Auteur: Lilas, Source: Revebebe

    – Dialogues –
    
    Arkshay me plaît tout de suite. L’écrivain à l’esprit prétendument si critique est simple, ouvert, plaisante beaucoup, et connaît très bien Mike, avec qui il engage une longue conversation en anglais, et dont j’ai du mal à suivre le fil. J’apprends qu’il est Indien, qu’il parle l’anglais, l’italien, le portugais et l’espagnol, un peu de russe, l’indien bien sûr, et baragouine des mots en français. J’utilise ce terme « baragouine » parce que c’est ainsi qu’il le présente, d’un air désolé.
    
    Il est aussi excessivement poli – presque péniblement. Je considère en général que la politesse n’est qu’une facette, heureusement positive, de l’hypocrisie, vice qui m’insupporte en toute occasion.
    
    Je ne parviens pas à lui donner un âge précis. Entre vingt-cinq et vingt-sept ans, je suppose.
    
    En réalité, le français de Arkshay est hésitant mais je comprends tout ce qu’il dit ; je me contente simplement de le reprendre de temps à autre pour lui suggérer un autre mot ou un autre temps. La compréhension et la gentillesse m’habitent pleinement : le français est une langue si compliquée et si riche qu’il est difficile de ne pas compatir envers ceux qui tentent de l’apprendre. Nous-mêmes, pauvres Français, mettons bien du temps à démêler toutes les ficelles de la langue.
    
    Je me sens impressionnée par son talent de linguiste. Mon cher Mickey Mouse, tu n’es pas aussi talentueux dans ce domaine. Encore une fois, silencieusement, je me demandepourquoitu ne détestes pas ...
    ... Arkshay. Je ne te connaissais ni humble ni modeste, et tu as annoncé Arkshay comme le messie. Étrange. As-tu changéà ce point-là ?
    
    – Et tu aimes la Suisse ? me demande Arkshay. (Je ne perdrai pas mon temps à retranscrire son vocabulaire décousu.)
    
    Je prends le temps de boire une gorgée de vin, le scrutant pensivement.
    
    – Oui, c’est… euh, c’est original.
    
    Cette réponse semble le laisser perplexe.
    
    – Original ? répète-t-il. J’ai entendu beaucoup de choses sur ce pays et sur cette ville, mais jamais qu’ils étaient original !
    
    – Originaux, reprends-je dans un réflexe. C’est juste que ça ressemble beaucoup à une grande ville de France, mais que c’est quand même très différent. Toutes ces banques, sans doute…
    
    – Tu es ici depuis longtemps ?
    
    – Quelques jours.
    
    – Tu restes encore un peu, dis-moi ? Il faut qu’on se revoie.
    
    – Euh…
    
    – Eva part dans trois jours à peine, interviens-tu.
    
    – Il faut venir en ville demain soir, dit Arkshay.
    
    Et là, il commence à t’expliquer quelque chose. En anglais, bien entendu. Certainement pourquoi il est si important que nous allions en ville demain.
    
    Je cesse peu à peu d’écouter, les yeux dans le vague. J’absorbe la nourriture. Le poulet à l’estragon, les brocolis tendres et savoureux, les pâtes aux poivrons. Tout cela dans une hâte digne de Speedy Gonzales. Une fois l’assiette vide, je reprends mes esprits. J’ai mangé sans penser à rien. Là aussi, c’est une grande première ! Finalement, ça arrive, de ne penser à rien. Ou du ...
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