Les obsèques joyeuses
Datte: 14/04/2019,
Catégories:
fh,
historique,
policier,
Auteur: Claude Pessac, Source: Revebebe
... suspendue, puis s’effondre vers l’avant. Plaquant ses mains sur les épaules de Sylvette, cassée en deux par l’orgasme, la jeune femme jouit bruyamment, ahane, sa bouche s’est arrondie, tétanisée. Son corps est parcouru de spasmes irrépressibles qui la secouent tout entière, ses genoux ploient, elle s’effondre doucement, un reste de conscience lui permet juste encore de ne pas se reculer et de perdre les doigts qui la fouillent encore.
Son plaisir refluant, la Comtesse se retrouve à genoux elle aussi, face à son amie, devenue son amante. Étourdie, reconnaissante, ses yeux parlent pour elle, exprimant son infinie reconnaissance à celle qui vient de lui faire découvrir des horizons nouveaux. Elle pose son menton sur l’épaule de Sylvette et verse silencieusement des larmes de bonheur.
Les deux jeunes femmes restent un bon moment immobiles, à genoux sur le sol, au centre de la pièce. Une infinie tendresse les unit, qu’aucune n’ose rompre. Mais l’inconfort de la position a raison de leur unité, Sylvette n’en peut plus de supporter le poids de sa maîtresse appuyée contre elle, ses genoux ankylosés l’obligent à se relever ; les deux femmes se séparent à regret :
— Merci, souffle la Comtesse, les yeux embués, alors qu’elles se relèvent.
Sans rien dire, Sylvette lui sourit tendrement, et lui dépose un léger baiser sur ses lèvres encore frémissantes…
oooOOOooo
Dans la lumière tremblotante des chandelles, le Père Augustus observe silencieusement son élève. Dans le ...
... secret de ce bureau, Arbogast, libéré de sa comédie, développe sa haute stature, oublie ses grimaces, ses gestes brutaux et maladroits. Indifférent à la présence de son mentor, le jeune homme marche, lentement, tenant d’une seule main, sans efforts apparents, le lourd volume des chroniques de l’Abbé Herter, comme s’il s’agissait d’un simple bréviaire.
Augustus se dit qu’Arbogast lui ressemble grandement, presque comme un jumeau ou plutôt, un fils, mais en plus grand, plus fort, et surtout plus raisonnable. Le religieux se reconnaît dans ce jeune homme vif, de corps et d’esprit : à son âge, il avait la même allure, la même force. Mais le jeune et turbulent Lothaire de Brunswick ne savait pas canaliser ses pulsions, gâchait ses forces en rixes et joutes ridicules, brouillait son esprit avec force vinasses, lutinait les filles faciles. Une vie de patachon bien décevante au regard des formidables possibilités que lui offraient son rang, sa fortune, sa famille. Tant et si bien que son père avait fini par le faire cloîtrer dans un couvent.
Là, enfermé, privé de tout, le jeune homme n’avait trouvé qu’un moyen pour s’évader : la lecture. Se plongeant dans les livres, saints pour la plupart, il avait été touché par la grâce, la foi lui était tombée dessus comme le faucon tombe sur le lapereau innocent, et il n’avait pu s’en défaire. Trop heureux, son père l’avait alors rêvé Évêque ou Cardinal, en attendant mieux.
Las, Lothaire, devenu Frère Augustus, avait conservé son esprit ...