Oublier
Datte: 27/02/2019,
Catégories:
fh,
nonéro,
aventure,
sf,
Auteur: Gufti Shank, Source: Revebebe
... l’année. Et puis…
Elle s’arrêta pour se retourner et jeter un regard inquiet et nostalgique vers les hautes montagnes.
— …là-bas, en ville, tout était si différent…
Je la pris dans mes bras et la tournai vers la mer et l’autre cité qui se reflétait au loin.
— Je te rappelle que nous avons dû fuir au risque de crever dix fois parce que tu étais condamnée à mort pour le meurtre d’une grosse crevure qui, elle, l’aurait mérité cent fois.
— Oui, je sais. Mais je pense à Dame Heline…
— Elle doit se sentir bien seule, depuis que tu es partie.
Alys darda ses grands yeux verts dans les miens.
— Elle t’aimait, elle me l’a dit. Elle me maudissait pour t’avoir séduite.
— Je crois que je l’aimais aussi. Mais…
Elle s’interrompit un moment, pensive, avant de reprendre :
— Mais c’est toi que j’aime plus que tout !
***
Au bout d’une bonne heure de marche en plein soleil, nous dépassâmes la dune et atteignîmes enfin la plage. De grandes vagues venaient mourir en roulant sur le rivage de sable fin.
— Viens, allons nous baigner !
— Nous baigner ?
Je me dévêtis en hâte et arrachai presque la tunique déchirée que portait toujours Alys, et malgré mon envie de courir à l’eau, je me figeai encore une fois à la vue des courbes parfaites de son corps enchanteur. Elle sourit en me voyant bouche bée, et me prit la main. Je l’entraînai et fondis de joie en entendant ses rires lorsqu’elle joua dans les vagues pour la première fois de sa vie.
Nous fîmes l’amour ...
... sur la grève, tendrement, léchés par les rouleaux agonisants, sous le lourd soleil chaud. Nos corps, ruisselants de sueur, de sel et d’eau, tournèrent entrelacés dans le flot sage jusqu’à ce qu’on s’effondre allongés l’un contre l’autre, les pieds dans les vagues et les yeux fixés dans l’azur illuminé, soupirant d’extase et de l’idée d’un bonheur retrouvé qui se présentait à nous.
Alys avait rapidement oublié l’inquiétude qui l’avait envahie quand elle avait réalisé que nous étions « dehors ». Dans le « dehors » qu’on lui avait appris à haïr et à redouter lorsqu’elle était enfant. Pour l’instant, même si ce monde aride manquait cruellement de vie, de végétation, de faune, rien ne semblait à ce point pollué que nous n’aurions pu y survivre. On devinait dans l’eau claire les va-et-vient de crustacés ou de mollusques bien vivants, et des poissons sautillaient parfois à quelques mètres du rivage.
Ressortant des rouleaux où j’étais allé me rafraîchir, j’avisai loin vers le nord les falaises et les hautes montagnes aux arêtes vives qui se découpaient au-delà de la plaine desséchée que nous venions de traverser. C’était là-bas que se trouvait Avila, Dame Heline et Tal-Mania ; là-bas que nous avions laissé toute notre rancœur, notre haine et notre désespoir. Et sur notre gauche, au bord de l’eau vers l’ouest, là où l’anse arrondie semblait s’achever, se devinaient des constructions étincelantes.
— Qu’est-ce qu’on fait ? On rejoint cette autre ville ?
— Tout vaudra mieux ...