1. Hallucination - Billevesée et Gaudriole !


    Datte: 14/02/2018, Catégories: ffh, fplusag, fsodo, init, historique, Auteur: Laure Topigne, Source: Revebebe

    ... s’en échappe pas.
    
    N’étais-je donc que revanche ou pis-aller ? Ne m’avait-elle entrepris que pour m’écarter de sa fille ? Ces questions m’ébranlèrent amèrement et mes élans en furent d’abord très contrariés. Je me rassérénai toutefois lorsqu’elle insista pour m’arracher promesse de la rejoindre dans sa chambre dès la prochaine nuit. Je la quittai très perplexe et chagrin pour rejoindre mon atelier en évitant soigneusement de croiser Mademoiselle Käthe. Deux heures plus tard, tandis que je m’affairais à esquisser les détails du fond de mon tableau, dame Lutgard vint m’y rejoindre. J’y vis mauvais présage car depuis mon entrée dans la maison, je m’en défiais fort et je la craignais chaque jour davantage. En effet, j’avais mesuré l’autorité qu’elle étendait sur tous, fille et petite-fille, domestiques évidemment mais aussi sur son gendre qu’elle semblait régenter d’une poigne de fer. En un mot : c’était elle l’homme de la maison. Je m’étais effrayé du mari alors que c’était l’aïeule qu’il convenait de redouter. Elle me jeta un regard noir et sans le moindre détour m’apostropha sèchement :
    
    — Jeune homme, vous couchez avec ma fille ce qui désespère ma petite-fille. Ne vous méprenez pas, ne croyez pas que ce soit une morale compassée qui présentement motive mon intervention. Il ne s’agit nullement de cela, bien au contraire.
    
    Malgré la gravité de la situation, j’ironisai en mon for intérieur, me demandant ce que pouvait être ce contraire d’une morale compassée mais Lutgard ...
    ... poursuivit :
    
    — Ma petite Käthe qui a dix-huit ans maintenant, était très fière de conquérir enfin son premier galant et voilà que sa mère, qu’elle jalouse pour foule de raisons, le lui subtilise. Mais là n’est pas mon affaire et si je vous dis cela, c’est pour que vous sachiez que de vos manigances je n’ignore rien. Mon propos est ailleurs : je constate que vous faites le portrait de mon gendre, contez fleurette à ma petite fille, satisfaites les appétits de ma fille et semblez m’éviter. Suis-je à vos yeux si négligeable personne ? La vieillesse et la laideur m’ont-elles à ce point marquée que je ne puisse prétendre qu’à indifférence ou aversion ? Mais pour qui donc vous prenez-vous pour ainsi de votre mépris… (elle sembla chercher le mot juste) m’accabler ? Veuve depuis dix ans, j’ai quarante-cinq ans mais me flatte d’en paraître bien moins.
    
    Quoiqu’elle fût fort bien conservée et ne portât de l’âge qu’à peine l’outrage, je devinais aisément que la coquette pour ne point dire la coquine mentait effrontément et à la vue de sa descendance, j’avais précédemment calculé qu’elle avait dépassé la cinquantaine. Je l’ai auparavant évoqué, mais en cette époque où la misère ambiante burinait très tôt les visages, ruinait et tordait les corps, seules quelques privilégiées bénéficiant de l’hygiène, des soins et du désœuvrement nécessaires à l’entretien de leur personne, pour peu qu’elles ne s’empiffrassent pas trop, pouvaient alors sauver l’élégance de leurs formes et la beauté de ...
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