1. Hallucination - Billevesée et Gaudriole !


    Datte: 14/02/2018, Catégories: ffh, fplusag, fsodo, init, historique, Auteur: Laure Topigne, Source: Revebebe

    Les premiers jours du printemps avaient fait fleurir les tables aux terrasses des cafés et je dégustais tranquillement mon scotch à celle du Phyllis quand je distinguai un jeune homme à son étrange tenue, pourpoint et haut-de-chausse tout droit tirés de l’époque médiévale.
    
    Il circulait de client en client, ouvrant sous leurs yeux un grand carton à dessin. Il semblait vouloir m’ignorer et je m’en réjouis car il m’était toujours pénible d’éconduire ces importuns.
    
    Il allait se retirer quand, brutalement, revenant sur ses pas il se dirigea droit sur moi et me salua.
    
    — Gente Hérodiade, je suis bien aise de vous rencontrer. Vous au moins consentirez à jeter un coup d’œil à mes peintures et dessins qui sont tous authentifiés comme des œuvres du 16ème siècle.
    — Mais qu’est-ce donc que ces billevesées, même si j’ai écrit quelques balivernes concernant Hérodiade, mon nom est Topigne… Laure Topigne. Je comprends maintenant cet attifement qui vous fait ressembler à un artiste de l’époque, mort depuis presque cinq siècles. J’hallucine peut-être mais vous n’en restez pas moins qu’un habile imposteur.
    — Laissons là pour l’instant nos identités et veuillez donc vous régaler de mon histoire qui n’est pas dépourvue de gaudriole.
    
    Plus que défiante, je l’admis à ma table tandis qu’il se lançait :
    
    oooo0000oooo
    
    — Je venais de retrouver l’Alsace et ma famille à Strasbourg après quatre années de difficile apprentissage à Nuremberg. J’étais à la recherche de premières commandes ...
    ... quand un ami me signala que le comte de Laurentzberg souhaitait faire exécuter son portrait. La famille était une branche collatérale de l’illustre lignée des Andlau, établie en cette bourgade alsacienne proche de Strasbourg. Je pris rapidement contact et une rencontre fut négociée. Je me rendis à Andlau afin de faire démonstration de mes talents car je n’étais pas maître encore. J’apportai des croquis et après quelques esquisses, le comte décida que malgré mon jeune âge et quoique encore apprenti, je devrais convenir et pourrais effectuer ce grand portrait qu’il ambitionnait.
    
    Quelques jours plus tard, je m’installai pour une durée indéterminée dans le vaste atelier qu’il m’octroyait, selon nos conventions, au sein de son immense demeure seigneuriale. Dès le souper il me présenta sa famille soit son épouse, la mère et la fille de celle-ci.
    
    — Vous avez devant vous trois générations de la plus fine fleur de la noblesse alsacienne. Avouez qu’une ressemblance aussi accusée est bien rare et qu’à l’âge près on se croirait confronté aux trois reflets d’un même original.
    
    Je fus en effet tant surpris qu’ébloui. À peine plus d’une trentaine d’années devait séparer la plus jeune, Käthe, de l’aïeule Lutgard qui devait tout au plus avoir cinquante-cinq ans, qu’elle portait d’ailleurs fort allègrement. Si le temps marquait en ces époques irrémédiablement les gens du peuple affrontés aux difficultés de la vie et la pénibilité de leurs besognes, les nobliaux ne vieillissaient guère ...
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