1. Où sont passés les poivrons jaunes ?


    Datte: 13/02/2018, Catégories: caférestau, nonéro, amiamour, consoler, Auteur: Lilas, Source: Revebebe

    ... mes yeux. Cette main qui avait envie mais n’osait pas, cette main qui était le prolongement d’une idée, d’un désir ; cette main comme le commencement d’un rapprochement physique, l’anticipation de caresses à venir, de frissons et de vertiges.
    
    Les hommes avaient des mains, les femmes avaient un cerveau qui les conduisait à fantasmer sur les mains, voilà où on en était, c’était la panade complète et je n’arrivais toujours pas à remettre de la couleur dans mes plats.
    
    *
    
    Un énième klaxon me tire de ma torpeur avinée. J’ai froid, maintenant. La bouteille ne parle plus. Pleine de vacuité, elle a arrêté de me causer depuis un moment. Il n’y a plus que moi sur ce balcon noctambule. Moi et mes pensées qui tournent en rond, moi et mes souvenirs de Fabrice, qui me font mal, mal, mal…
    
    Je me lève avec précaution, la chaise de jardin racle sur le dallage, ça fait un boucan d’enfer. Je sens que dès potron-minet, le voisin du dessous va venir me saouler. Peu importe. Plus rien n’a d’importance. Je vais continuer à aimer mon mari, à élever mes enfants, et la vie roulera comme ça jusqu’à que ce que ce soit moi qui roule au bas d’un fossé, après une cuite, ou au cul de Pascal pour le lécher, parce que j’aurais tellement envie de faire un truc dingue, de péter la routine, de la tordre, de foutre en l’air mes principes… parce que j’ai le vide de Fabrice, et que rien ne viendra plus combler cette béance pitoyable. Surtout pas cette bouteille, surtout pas mes pensées qui tournent en ...
    ... rond.
    
    Je rentre. Les portes de la baie vitrée claquent derrière moi.
    
    *
    
    L’été est passé.
    
    On est parti en vacances avec les enfants. Je n’ai plus posé de questions à personne sur l’amitié entre un homme et une femme. J’ai appris par nos amis communs que Géraldine était enceinte, et que Fabrice était revenu au domicile conjugal. J’ai été heureuse pour eux. J’ai eu envie d’envoyer une belle carte de félicitations, mais au moment de la mettre dans la boîte aux lettres… je ne sais pas. Mes doigts tremblaient, mon cœur battait fort, et j’ai pensé que Fabrice n’aimerait pas que je me mêle de sa vie privée. Pourtant, comme j’étais heureuse pour eux, pour lui !
    
    J’ai serré la carte contre ma poitrine, tout doucement, le papier a craqué un peu au contact de mon chemisier. Je pensais à leur bébé, que je ne pourrais sans doute pas le connaître, ni le serrer dans mes bras.
    
    Les enfants m’ont appelée. Je me suis retournée, je les ai vus, souriants, détendus, aimants, et j’ai fondu de bonheur.
    
    La carte, je ne l’ai jamais postée.
    
    Un jour, je suis revenue voir Pascal à mon bistrot préféré. On a discuté de choses et d’autres. Je ne me suis souvenue de ma passagère faiblesse pour lui, il y a quelques mois, qu’en regardant une de ses mains, par inadvertance. Ça ne m’a pas fait grand-chose, j’ai souri, et on a continué à discuter sans arrière-pensées. Enfin, je crois. Sanstrop d’arrière-pensées.
    
    C’est suite à cette brève rencontre que ça m’a pris. Cette putain d’illumination ...