1. Où sont passés les poivrons jaunes ?


    Datte: 13/02/2018, Catégories: caférestau, nonéro, amiamour, consoler, Auteur: Lilas, Source: Revebebe

    ... vois bien ? a dit Pascal, encore plus doucement. Tu as compris.
    — Je ne suis pas sûre, ai-je rétorqué malgré tout.
    
    Et c’était vrai. J’étais désarçonnée, et envahie d’une drôle de sensation. Mais j’avais peur d’être parano. J’ai coulé en douce un regard curieux vers Pascal. Nos yeux se rencontrèrent et je les baissai aussitôt, me mordillant la lèvre.
    
    — Voilà, a-t-il conclu, et il est reparti dans un rire, mais plus grave qu’à l’accoutumée.
    — Explique, ai-je chuchoté.
    — C’est simple. On ne peut pas être ami avec une femme, surtout quand c’est une belle femme. Il y aura toujours du désir entre l’homme et la femme.
    — Mais…
    — Je sais, vous, les femmes, vous y croyez dur comme fer. Et pourtant, je suis certain que le mec, quel qu’il soit, il aura toujours une arrière-pensée, à un moment donné. Pour vous, les nanas, je sais pas. Sans doute que oui aussi. Mais je suis moins sûr.
    
    J’ai soupiré et posé le reste de croissant sur le comptoir. J’ai à nouveau croisé mon regard dans ce putain de miroir lisse. J’avais l’air lisse, moi aussi. Et pourtant, je me sentais faite de pics et d’aspérités, durs, sévères, et aussi de meringue molle et qui colle aux doigts.
    
    Dans mon image, ça ne se voyait pas. On distinguait juste les traits de mon visage, lisses, mes cheveux, lisses, et ma bouche qui faisait la moue, lisse également. Et mes yeux étaient vides. Faisait chier, tout ça. Bien sûr, c’était pas la première fois que j’avais des pensées existentielles. Néanmoins, je prenais ...
    ... conscience de tout un tas de réalités qui ne m’avaient jamais réellement effleurée. Comme ce foutu regard qui cache tout, ou ne dévoile rien, kif-kif. On s’imagine des choses ou au contraire, on ne voit rien, et il s’y passe de méga-conflits qui font chier.
    
    Alors voilà, c’était ça, le secret de la réussite dans l’amitié homme/femme. Juste que l’un et l’autre, ou l’un ou l’autre, ne savaient pas lire le regard de son ami. Ou que son ami était super bon comédien, et ne montrait pas ce qu’il pensait vraiment.
    
    — Donc… ça n’existe pas, ai-je murmuré douloureusement.
    — Je n’ai pas dit ça, s’est étonné Pascal.
    
    Je l’ai dévisagé. Il semblait embêté pour moi. Au moins, ça, je le percevais.
    
    — Explique ? ai-je intimé, et j’étais plus directe cette fois.
    — J’imagine que l’on peut être parfaitement ami avec un ex, a déclaré Pascal.
    — Pourquoi ?
    — Ben parce qu’il n’y aurait plus de désir entre les deux personnes. Vu qu’il aurait déjà été comblé.
    — Mouais. C’est mort alors, puisque je n’ai jamais couché avec Fabrice…
    — Euh…
    — … et qu’évidemment, je ne compte pas coucher avec lui.
    — Ah.
    — Voilà… c’est tout. Je crois bien que je peux tirer une croix sur mon amitié avec lui.
    
    Pascal n’a rien dit. Il s’est contenté de me regarder. Et moi, je pensais à Fabrice, et mon cœur était tellement lourd. Et je ne pouvais pas m’empêcher d’observer à la dérobée les doigts de Pascal, toujours immobiles tout près de ma peau nue. Je sentais qu’il avait raison.
    
    La preuve était là, sous ...