1. Où sont passés les poivrons jaunes ?


    Datte: 13/02/2018, Catégories: caférestau, nonéro, amiamour, consoler, Auteur: Lilas, Source: Revebebe

    ... avec la même innocence qu’avant. J’ai eu encore plus le cafard. Je crois bien que je me suis même mise à pleurer (on se refait pas, oui, je sais). Pascal m’a serrée contre lui, un peu maladroitement à cause de sa bedaine de quinquagénaire vieillissant.
    
    — Chut… a-t-il murmuré d’un air apaisant.
    
    Heureusement, le bistrot était pratiquement désert. On était en semaine et il pleuvait des seaux d’eau comme des méga-citernes, dehors. Je me suis essuyé les yeux en me traitant intérieurement de petite fille fragile, puis j’ai risqué un sourire à travers les larmes de rimmel sur mes joues. Pascal s’est foutu de moi. Tu sais, peut-être que ça peut paraître méchant. Mais c’est exactement ce qu’il me fallait. L’équilibre entre nous était rétabli.
    
    — J’ai un ami très cher, ai-je commencé. Il ne croit plus en l’amitié entre un homme et une femme. Je te parle de la vraie amitié, celle qui te fait battre le sang quand tu t’inquiètes pour ton ami, ou te sentir aux anges quand il est heureux.
    — Ouais.
    — Il y a quelques semaines, Fabrice m’a avoué avoir des… envies qu’il n’aurait pas dû ressentir. Pour moi, je veux dire.
    — Ouais ?
    — Ben tu sais, ce genre de choses qui te donne envie de poser les mains ou la bouche là où il faut pas…
    — Ah… ouais…
    — Du coup, je savais plus où me mettre…
    — Hum…
    — J’ai dit des horreurs…
    — Ouais ?
    — Ouais, genre il était possédé, et je sais plus quelle connerie…
    — Ah, ouais !
    — Putain mais t’es vachement loquace hein, pour un barman !
    
    Pascal a ...
    ... éclaté de rire une nouvelle fois. J’aimais vraiment son rire. J’aurais bien aimé l’entendre tous les jours, même. Peut-être que ça m’aurait mis du baume au cœur pour toute la journée. J’ai souri, et j’ai fini mon café. Il était froid.
    
    — Attends, a murmuré Pascal en se levant.
    
    Il est allé me chercher un croissant.
    
    — Merci…
    
    Il me faisait fondre, cet homme. Touchant, attachant, et si gentil. La première fois que je l’avais vu, je l’avais pris pour un putain de macho décérébré. Mais rapidement, j’avais compris que c’était un homme sincère et délicat, qui se cachait des autres. Il portait un masque en permanence. Normal, pour un barman. Son rôle, c’était pas de se montrer, mais d’écouter les bobos de la clientèle. Puis, je crois bien qu’il aimait ça, le Pascal, écouter. Il aurait dû être psy.
    
    J’ai mordu à pleines dents dans le croissant, puis j’ai contemplé Pascal en mâchonnant.
    
    — Tu en penses quoi, toi, de tout ça ? ai-je quand même demandé.
    — De quoi, précisément ? a-t-il répondu d’une voix douce.
    — De l’amitié…
    — Entre un homme et une femme ?
    — Oui…
    
    Il a eu un sourire énigmatique, puis a baissé les yeux sur sa main. Elle se trouvait toute proche de mon bras, posée à plat sur le comptoir. J’ai aussi baissé les yeux sur elle, et l’ai regardée attentivement. Ce n’était pas une main paisible, ni innocente. Elle ne bougeait pas, mais on sentait bien qu’elle attendait, en quelque sorte, qu’elle palpitait d’attente. Je me suis sentie un peu troublée.
    
    — Tu ...
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