1. Où sont passés les poivrons jaunes ?


    Datte: 13/02/2018, Catégories: caférestau, nonéro, amiamour, consoler, Auteur: Lilas, Source: Revebebe

    ... Pascal, le proprio du bar, est venu s’asseoir à côté de moi.
    
    — T’as pas l’air dans ton assiette, en ce moment, m’a-t-il lancé, et il brillait dans ses yeux cette petite lueur intriguée qui donne toujours envie de se confier aux gens qui écoutent vraiment.
    
    J’ai haussé les épaules sans répondre. Se confier, ça servait à rien. Plus rien ne servait à rien, d’ailleurs, si Fabrice n’était plus dans ma vie. Le comptoir était froid sous mes avant-bras nus. J’ai frissonné.
    
    — Allez, m’a encouragée Pascal, en me pressant l’épaule.
    — Boarf.
    — Mais encore ? Ce sont les petits qui t’en font voir ?
    — Nan.
    — Ton mari alors ?
    — Nan.
    — Le boulot ?
    — Nan !
    
    C’est qu’il connaissait toutes les parties de ma vie, le Pascal. Faudrait que je songe d’ailleurs à me limiter, côté confidences aux barmen. Dès qu’on a un coup dans l’pif, c’est toujours vers eux qu’on se tourne pour leur raconter les grandes Vérités de la Planète, et accessoirement, les petits détails de notre vie sexuelle, voire même la misère de nos tracas quotidiens. En gros, quand ton mec a une petite bite, que ta gamine a trouvé ta cachette de sextoys ou que tu te lamentes de toujours marcher dans des merdes de chien sur le trottoir, la première personne à compiler ces différentes informations, c’est le copain barman.
    
    Pas étonnant qu’ils sachent toujours à quel moment t’as besoin d’un remontant.
    
    J’ai justement regardé le verre de cognac que Pascal avait glissé vers moi, sur le comptoir lisse. Ce dernier était ...
    ... tellement briqué que je me reflétais dedans comme dans un miroir. J’ai croisé mon regard, et ça m’a déplu.
    
    Pendant une minute, j’ai cru que j’allais résister. Puis j’ai vidé le petit verre, cul sec. Ça m’a brûlé l’œsophage. Tu m’étonnes, à dix heures du matin. Mon estomac avait déjà eu du mal avec le café dégueulasse… Pascal a ri. Il avait un bon rire, ce Pascal. Franc mais léger, sans en faire trop. Je les avais toujours bien aimés, lui et son rire.
    
    J’ai lorgné ses mains, ses doigts, forts et habiles, et me suis vaguement demandé quel effet ça me ferait s’il me les fourrait dans le vagin.
    
    — Mais tu penses à quoi ? s’est offusqué, Pascal. (Il n’avait apparemment perdu aucun de mes regards.)
    — Euh…
    
    J’étais devenue rouge comme une belle pivoine rubiconde. Pascal me scrutait avec grand intérêt.
    
    — Ben à rien de particulier, ai-je menti.
    
    Puis j’ai pris conscience de ce qui venait de se passer. Merde. C’était un bon copain, finalement, même s’il était barman. Et je venais d’avoir une pensée érotique à son encontre. Je n’avais jamais réalisé à quel point l’amitié entre un homme et une femme pouvait tenir sur un cheveu. Qu’est-ce qui faisait qu’on allait plus loin avec certains hommes, et ce qui nous arrêtait avec d’autres, limitant notre lien à de la belle amitié.
    
    Depuis le pétage de plomb de Fabrice, il me venait de plus en plus souvent ce genre de pensées. Je crois bien que c’était foutu maintenant. Je n’arriverais plus jamais à considérer mes copains hommes ...
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