1. Où sont passés les poivrons jaunes ?


    Datte: 13/02/2018, Catégories: caférestau, nonéro, amiamour, consoler, Auteur: Lilas, Source: Revebebe

    ... sera jamais plus comme avant. Ce n’est pas vraiment ta faute. On n’y peut rien, c’est tout. L’amitié, lavraie, avec une femme, je n’y crois plus.
    
    Il a sorti un billet de vingt de sa poche, je savais qu’il allait partir, mais je n’arrivais pas à dire quoi que ce soit. Qu’aurais-je pu dire ? J’avais la tête vide, et pourtant une atroce migraine commençait à me la presser tellement fort qu’on aurait pu voir du jus couler de mon cerveau. Fabrice a hésité… et m’a tourné le dos, sortant du café sans même un au revoir. Encore.
    
    *
    
    Eh oui, l’inconstance masculine.
    
    Mais ta gueule, franchement, ta gueule. D’abord, ça concerne plutôt les femmes, l’inconstance, alors avant de parler hein… On dit bien « Souvent femme varie, bien fol est qui s’y fie. »
    
    C’est marrant quand tu t’insultes toi-même. Comme si, pourtant simple vaisseau de verre qui se briserait en pierres d’étoiles sur les rochers, j’étais doué de parole.
    
    Ha ha. Tu vois, je me marre. À bout.
    
    Arrête de boire.
    
    Tu es vide alors y a pas de mal. Au trou !
    
    Et la suite de ton histoire, alors ? Tu as parlé avec Géraldine, Antoine ? Tu t’es confiée à quelqu’un ?
    
    Au début, non.
    
    J’ai continué à pleurer mon Fabrice même quand mes yeux étaient secs. Avec mes enfants ça a été dur d’expliquer pourquoi ils ne voyaient plus « tonton Fab’». Mon mari a appelé Fabrice, ils ont eu une conversation un peu houleuse, que j’ai avidement suivie, tout en fourrant, de façon anarchique j’en ai bien peur, des cuillères de ...
    ... compote dans la bouche de ma fille. Quand Antoine a raccroché, il m’a dit, les yeux sombres :
    
    — Laissons Fab tranquille un moment. Il n’a pas besoin de nous dans sa vie en ce moment.
    
    J’ai ouvert la bouche pour protester, mais en croisant le regard soupçonneux de ma fille, je me suis tue. De la compote pendait de son nez et badigeonnait ses joues et son menton. Pauvre chérie. Elle devait se demander si sa mère n’était pas devenue à moitié cinglée. J’ai ravalé ma peine, et j’ai recommencé à prendre soin de mes enfants.
    
    Les jours ont passé. Loin de m’apaiser, je sentais grossir la boule d’injustice et de douleur dans mon cœur. Et, enfin, j’ai fini par me poser les bonnes questions…
    
    Est-ce que Fabrice pouvait avoir raison ? N’avais-je pas été folle de croire que je pouvais être amie avec un homme sans qu’il ne naisse, ou en l’un ou en l’autre, cette brûlante envie d’aller plus loin ?
    
    Oh, je m’étais déjà demandé tout ça, bien sûr, quand j’étais ado. J’avais de bons potes. Je m’interrogeais souvent sur ce qu’ils pensaient de moi. Mais je n’ai jamais osé les consulter à ce sujet. J’avais peut-être peur de le savoir.
    
    En vieillissant, j’ai pris les gens comme ils me venaient. Sans juger, sans analyser. Au bout du compte, je n’y ai plus pensé, à cette éternelle question que tout un chacun se pose, à un moment donné de sa vie.
    
    Et puis j’en voyais tellement, des amis hommes et femmes, se comporter comme des frères et sœurs… Pour moi il était clair qu’on n’avait plus ...
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