La belle Hélène - Histoires de Sexe

La belle Hélène

... entrer ? Le pas de la porte n’est pas l’endroit idéal pour bavarder.

Elle me suit au salon, je la débarrasse de son imperméable et l’invite à prendre place sur le canapé. Je suis impressionné et timide. Elle, chez moi ? Je m’assois de l’autre côté de la table basse. Elle s’accorde quelques secondes, puis se lance :

— Vous m’avez croisée, l’autre jour.

Je suis horriblement gêné.

— Oui, c’est possible…

Elle insiste :

— Je n’étais pas seule…

Hélène, pourquoi viens-tu me retourner ce fer-là dans la plaie ? À moi de m’accorder une pause. Je réfléchis à toute vitesse et prends la décision qui s’impose :

— Je n’en ai pas le souvenir.

Elle me rabat, en plantant son regard dans le mien.

— Pourquoi mentir ?

Je frémis.Tu es folle : tu ne dois surtout pas me mêler à ça ! Et cesse de me fixer comme ça, tu vas me transformer en pétard de Nouvel An chinois !

— Vous m’avez vue avec un monsieur, au sortir d’un hôtel, à vingt kilomètres de chez moi. Vous devinez bien ce que nous avons pu y faire ?

Son culot me cisaille. J’hésite, puis implicitement, j’avoue :

— Je vous accorde que ce n’est pas très difficile à imaginer.

Une pause.Hélène, tu veux me faire crever de frustration ?Je concède, pour chasser le silence :

— Bon, oui, soit. J’ai bien pensé que ce vous aviez pu faire dans cet hôtel ressemble à ce que ferait n’importe quel couple au même endroit. Mais vous auriez pu, tout aussi bien, consommer un café au bar, en toute innocence, non ...

... ?

Elle éclate de rire :

— Merci pour votre tact.

Elle en vient enfin à ce qui doit la préoccuper :

— C’est délicat pour moi de vous poser cette question : qu’allez-vous faire en ce qui me concerne ?

J’inspire profondément, et lâche tout à trac :

— Soyons clairs. J’ai décidé de n’avoir rien vu. J’ignore délibérément de quoi vous me parlez, et je ne me mêle pas de ce qui ne me regarde pas.

J’ajoute :

— De surcroît, votre mari n’est pas ma tasse de thé. Alors, il ne faut surtout pas compter sur moi pour lui donner du grain à moudre, ni à quiconque, d’ailleurs. Soyez donc rassurée, et surtout, assurée de ma discrétion. Je ne vais rien faire du tout.

Son soulagement est visible. Elle me regarde comme le Bon Dieu. Pas comme ça,Hélène, pas comme ça ! Derrière le Bon Dieu se cache le Diable !

— J’avais longuement hésité, mais maintenant, je ne regrette pas d’être venue vous parler. Vous êtes un type bien.

Mon ego en prend en coup. Il ne faudrait surtout pas qu’elle me remette une louche de cette soupe-là, car elle ferait de moi le loup de Tex Avery !Hélène, tais-toi ! Au contraire, elle en rajoute :

— J’ai un aveu à vous faire. En arrivant ici, pour obtenir, comment pourrais-je dire… votre silence ? J’étais prête à tout.

Interloqué :

— À tout ?

Péremptoire :

— À tout !

Ah ! le con ! Le con que je suis ! J’éclate de rire. Elle lève les sourcils.

— J’aurais mieux fait de me taire et de vous laisser aller au bout et… « à tout », vous ne ...