1. JN0203 Une route longue et sinueuse.


    Datte: 27/09/2018, Catégories: Entre-nous, Les hommes, Auteur: Fab75du31, Source: Hds

    « Hey, mon pote, comment vas-tu ? ».
    
    Le sms de Julien arrive à point nommé : peu après le coup de fil de Jérém, alors que je marche sur les Berges de Garonne, la tête et le cœur en vrac, incapable de trouver le chemin de la maison.
    
    Inattendu. Bouleversant. Ce coup de fil m’a fait l’effet d’une bombe ayant explosé dans ma poitrine. Mon cœur s’est emballé dès l’instant où j’ai vu son numéro s’afficher à l’écran ; pendant la durée de nos échanges, j’ai été comme en apnée, les jambes tremblantes, une sorte de vertige altérant mes sens et mes perceptions.
    
    Je viens de raccrocher et je me sens secoué, assommé, retourné comme une chaussette. J’ai chaud, j’ai froid, j’ai des sueurs, j’ai des frissons, j’ai l’impression de trembler, de flotter. J’ai beau marcher, je n’arrive pas à me calmer : sa voix, ses mots me suivent où que j’aille, ils me hantent.
    
    Car chacun de ses mots m’a fait vibrer ; la vibration masculine et sensuelle de sa voix a fait remonter des souvenirs, des ressentis, des émotions, des sentiments, des images, des odeurs, des sensations : ce coup de fil a fait rejaillir en moi toutes les couleurs dont étaient composés mes espoirs de bonheur, tout un monde, un Paradis perdu.
    
    Alors, oui, le sms de Julien est plus que bienvenu : un sms auquel je m’empresse de répondre, comme une bouée de sauvetage à laquelle je m’empresse de m’accrocher :
    
    « Salut, dispo pour un verre maintenant ? ».
    
    « Ds 15 min au Quinquina ».
    
    Un quart d’heure plus tard, je suis ...
    ... installé à une table du Quinquina ; et je viens de réaliser que le Quinquina, c’est un bar gay. Je me demande si Julien est au courant de ce petit détail. Je regarde à nouveau son sms, et c’est bien marqué « au Quinquina ».
    
    C’est la première fois que je mets les pieds dans un bar gay après la soirée au B-Machine. Définitivement, je ne suis toujours pas à l’aise avec ce genre d’endroit : j’ai toujours l’impression de ne pas être à ma place, l’impression qu’on me regarde comme un OVNI, l’impression de ne pas être « assez » : assez bien sapé (d’autant plus ce soir, où je n’avais pas du tout prévu de « sortir »), assez stylé, assez pd tout court. J’ai à la fois l’impression qu’on m’observe comme une bête rare, mais sans intérêt, ou qu’on me matte comme un nouveau gibier tout fraîchement découvert ; je redoute à la fois qu’on puisse m’ignorer, se moquer de moi, ou bien qu’on me propose un plan « à la Mourad », un coup sans lendemain, merci et « au revoir ». Je ne veux pas revivre ça.
    
    Je croise quelques regards, mais je n’essaie pas de les accrocher. Je n’ai pas envie de tenter de savoir ce que ma présence inspire : c’est suffisamment le bordel dans ma tête, à cause du coup de fil de Jérém.
    
    De toute façon je ne suis pas là pour tenter de draguer ; je suis là pour prendre un verre avec un pote, et pour me confier à lui. Mais qu’est-ce qu’il fiche Julien ?
    
    C’est moins pour étancher ma soif que pour tenter de me donner une contenance, que je commande une bière blanche ; en ...
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