1. Braquage


    Datte: 19/09/2018, Catégories: handicap, nonéro, policier, Auteur: Rain, Source: Revebebe

    ... m’étreint dans ses bras. Il me serre contre son imposante poitrine et me fait tournoyer comme une jeune mariée, mes pieds moulinant dans les airs. Il me broie les côtes. Je commence à manquer d’air. Un dernier tour de manège et il se décide enfin à autoriser mes semelles à toucher terre.
    
    Il me sourit. À contempler son visage enfantin aux traits lisses et ronds, je comprends tout de suite qu’il n’a pas la lumière allumée à tous les étages.
    
    Il paraît heureux. Ses yeux rayonnent. Il m’offre en spectacle ses dents grosses comme des touches de piano et me demande :
    
    — Tu leur as fait bobo ?
    
    Bobo, comme c’est mignon !
    
    Après un rapide coup d’œil sur les deux cadavres auxquels il manque une partie de la tronche, je ne peux m’empêcher de sourire pendant que mon cerveau analyse la situation et m’annonce froidement que je ne suis qu’un meurtrier. Que je vais finir ma vie derrière les barreaux ! Qu’en taule, je risque de rencontrer des lascars bien plus durs à cuire que moi…
    
    Perdu dans mes pensées, je n’écoute plus le gros balèze. Il me saisit à l’épaule et me secoue comme un prunier. Il veut encore savoir si je leur ai faitbobo
    
    Il le voit pas ce con ! Ils ont la gueule en marmelade.
    
    Je lui réponds néanmoins poliment :
    
    — Oui, je leur ai fait bobo à ces vilains.
    — Merci, m’annonce-t-il les yeux emplis de larmes et il m’enlace une nouvelle fois.
    — Calme-toi, ça va aller, lui dis-je en tapotant son dos.
    — Ils me frappaient tout le temps, hoquette-t-il. Ils ...
    ... étaient pas gentils ! Jamais gentils ! Papa et maman m’aimaient pas ! Ils me le disaient en me giflant.On t’aime pas Émile, t’es pas beau et t’es con comme une valise… Et surtout inutile, m’explique l’armoire à glace en modifiant l’intonation de sa voix, probablement pour imiter la voix de feu son père.
    
    Ne sachant que dire à cet attardé qui doit certainement avoir dans les quarante bougies, je me contente de lui rendre son accolade sans pouvoir détacher mon regard des zébrures qui strient son corps.
    
    Il est évident que ce n’est pas la première fois que ces salauds le maltraitaient. Ça turbine dans ma caboche. Que vais-je faire de ce gars ? Il pourrait s’avérer être un témoin gênant. Qui plus est, j’ai deux macchabées dont il faut que je me débarrasse. Heureusement, pas de voisins à des kilomètres à la ronde.
    
    Mes yeux retournent sur les parents d’Émile et en contemplant leur fiole défoncée et les morceaux de cervelle accrochés à des fragments d’os, de la bile acide remonte de mon estomac et gicle de ma gorge en un jet presque aussi puissant que celui de la fille possédée dansL’Exorciste.
    
    Émile pouffe de rire et m’imite en train de gerber.
    
    La mort de ses parents n’a pas trop l’air de l’affecter, ce qui est une bonne chose pour moi, car, si le bougre s’était offusqué de leur décès et mis en colère, j’aurais certainement terminé ma journée au boulevard des allongés, ses avant-bras étant presque aussi gros que mes cuisses.
    
    Un film inquiétant est en train d’être projeté ...
«1234...12»