Chaos, l'immesurable abîme
Datte: 16/09/2018,
Catégories:
nonéro,
Auteur: Lilas, Source: Revebebe
... souviendrais.
Quand sa sœur arriva, Liana méditait encore sur cette rencontre inattendue. C’était incroyable comme on pouvait passer à côté des gens sans les voir, sans voir toutes les occasions à portée de main. Le vieux principe de la patate sous le nez, se disait Liana. La patate était tellement grosse qu’on n’en voyait pas les contours ; c’était comme si elle n’était pas là. Mais elle vous bouchait bel et bien la vue.
Liana se dit encore qu’elle avait dû avoir une si grosse patate sous son nez, durant ces derniers mois, qu’elle aurait pu faire des tonnes de purée avec.
L’idée de purée l’écœura un peu.
– Qu’est-ce que tu as ? fit Fanny après l’avoir embrassée.
– Je sais pas, grimaça Liana. Ça doit être le déjeuner qui passe mal. Je n’ai pas l’habitude de manger autant.
Fanny étouffa un petit rire et posa sa mallette sur le bureau.
– Je vois. Mais je ne te parlais pas de ta mine, je me demandais simplement ce que tu faisais ici.
– Oh. Eh bien, je suis allée dans le parc tout à l’heure. Avec l’écrivain.
– Ah bon ? Et alors, comment ça se passe avec lui ?
Liana regarda sa sœur se pencher sur le bureau, écouter le répondeur pour voir s’il y avait eu des messages entre midi et deux, puis commencer à classer de la paperasse dans les tiroirs.
– J’en sais rien, répondit pensivement Liana. Peut-être que je vais laisser tomber.
– Pourquoi ? demanda Fanny en interrompant brusquement son classement.
Elle leva un regard scrutateur sur sa sœur ...
... cadette. Liana se sentit gênée.
– J’en sais rien, répéta-t-elle.
Puis elle poussa un soupir et s’assit de l’autre côté du bureau. Fanny ne la quittait pas des yeux.
– Il est si bizarre que ça, cet homme ? insista Fanny.
Liana haussa les épaules.
– Oui, il est bizarre, mais ce n’est pas la raison. J’ignore si je vais pouvoir m’investir là-dedans. J’ai l’impression… de ne pas être à ma place.
Liana avait marqué une pause avant d’ajouter cette dernière phrase. Fanny sembla pensive un moment, puis elle se remit à classer ses documents.
– Tu as une petite mine aujourd’hui, dit prudemment son aînée, tout en continuant sa besogne.
Elle avait jeté ça avec une sorte de nonchalance qui n’abusa pas Liana. Celle-ci se sentit même vexée.
– J’ai pas bien dormi ! répliqua-t-elle un peu sèchement.
Mais Fanny se contenta de lui jeter un coup d’œil pénétrant, avant de reporter son attention sur ses papiers.
– Je disais juste ça comme ça, dit-t-elle.
Liana se mortifia d’être aussi susceptible. Bon dieu, quand pourrait-elle enfin retrouver sa sérénité et sa patience ?
– Je sais ce que tu te dis Liana, intervint Fanny. Mais je t’assure que tu n’y arriveras jamais si tu continues à te culpabiliser.
Liana resta silencieuse. Elle réfléchissait sur ce que pouvait bien contenir ce « y », pour sa sœur. Elle « y » arriverait, elle n’ « y » arriverait pas…
Arriver à quoi, au juste, Fanny ? avait-elle envie de crier. Et le cri explosait réellement dans sa ...