1. Quarante méduimètres


    Datte: 14/08/2022, Catégories: fantastiqu, amour, revede, caresses, Oral conte, Auteur: Serafin, Source: Revebebe

    ... se moque Mélisse.
    — Maintenant oui, mais ça ne l’était pas il y a une décennie encore. Mes yeux se sont agrandis, je vois sans angle mort maintenant.
    — Sans angle mort ?
    — L’espace entre mes yeux était trop grand, il me manquait des bribes. Mais c’est du passé !
    
    Une, deux, puis une demi-douzaine de cacahuètes passent par-dessus le chapeau du méduine, repassent dans l’autre sens. Mélisse blêmit.
    
    — Tes grands yeux, ça veut dire que… tu vas bientôt mourir ?
    — Oh, il me reste sûrement une demi-douzaine de décennies avant ce genre de désagrément. Mais il ne s’agit pas vraiment de mourir, Mélisse. Je renaîtrai à la manière des phœnix. Quand un méduine s’électrocute – c’est-à-dire s’électrocute avec ses globes oculaires – il se transforme alors en une boule gélatineuse. Cette boule végète, parcourue d’arcs électriques, jusqu’à ce que l’un de ces arcs active un code génétique. Un ou plusieurs mini-méduines se forment alors à partir de cette boule. Bref, je suis immortel !
    
    Une salve de cacahuètes s’envole vers le plafond pendant A’oy fait deux tours sur lui-même. Et s’emmêle les tentacules. Et atterris dans le bol d’arachides.
    
    — Eh bien, papy immortel, on n’a plus les réflexes de sa jeunesse ?
    
    Mélisse s’enfuit en riant sous le bombardement de cacahuètes.
    
    [5 mois plus tard]
    
    Mélisse se réveille en sursaut. Ce n’était rien qu’un mauvais rêve, se morigène-t-elle. N’empêche… C’était un rêve, ça oui. Mais mauvais ? Si elle est tout à fait honnête avec elle, ces ...
    ... ventouses sur sa peau étaient douces. Sensuelles. Excitantes. Le parcours des tentacules sur elles. Sournois. Insidieux. Délicieux. Ces tentacules d’un violet translucide, comme…
    
    [6 mois plus tard]
    
    Le méduine flotte au-dessus de son bureau, plume et encre de seiche au tentacule, quand entre Mélisse. Ses cheveux crépus portent des traces de givre – la saison chaude a été brève cette année. Elle se laisse tomber sur le fauteuil à côté d’A’oy ; c’est le jour de vérité.
    
    — Alors ? méduit-elle timidement.
    — Tes dettes sont épongées, Mélisse. Le loyer de ce mois est honoré, et on a huit sacs d’orge en réserve.
    — Et les méduines viennent en nombre, comme tu l’avais dit. On est sauvé, A’oy !
    
    Cette fois, elle ne se prive pas de le prendre dans ses bras et de le faire tournoyer.
    
    Quelques gouttes ont volé des cheveux de Mélisse sur le chapeau d’A’oy où elles glissent paresseusement, soulignant la délicatesse de la chair translucide. Mélisse craque. Pose ses lèvres sur le chapeau d’A’oy. Et, délicatement, capte de sa langue les gouttelettes éparses.
    
    Mélisse sent un tentacule se poser sur sa joue, caressant, souple, frais… puis la caresse se mue en pression, la repoussant. Les autres tentacules méduisent à toute vitesse :
    
    — Mélisse, qu’est-ce que tu fais ?
    — Je ne sais pas, A’oy. Je… j’avais envie.
    — Mélisse, tu es une humaine, je suis un méduine. Ôte-toi ça de la tête.
    
    A’oy quitte précipitamment la pièce, laissant en plan le livre de comptes ouvert et la bouteille ...
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