À Paris - Histoires de Sexe

À Paris

... fait, on n’entend plus que nos mastications. Merci Béa. Mais quand père rumine, c’est mauvais signe. Il revient vite à la charge avant le dessert :

— Donc, si je comprends bien, je vais pouvoir diminuer ma contribution à ta vie parisienne du coût d’une carte de transport, n’est-ce pas ?
— Euh… pas vraiment. C’est-à-dire que HEC est beaucoup plus loin qu’Henri IV et je ne pourrais pas faire le trajet à pied. Sauf de temps en temps si j’ai le temps et la météo avec moi.
— Je vois. Tous les moyens sont bons pour tirer le maximum de ton père.
— Ne crois pas cela. Je fais vraiment tout mon possible pour rester « dans les clous ». Mais cette fois, je ne pourrai pas. Les frais de scolarité sont tellement élevés que… je pense négocier un prêt étudiant avec ma banque, enfin « ta » banque.
— Quoi ? Qu’est-ce que c’est que ce principe de minable ? Tu ne vas pas commencer ta vie avec des dettes ? Moi, mon p’tit, je n’ai jamais eu de dettes, je n’ai jamais emprunté. J’ai toujours payé cash ! Et mon fils ne transgressera pas ce principe. Ils se montent à combien ces frais de scolarité ?
— Quatorze mille euros… par an… Quarante-deux mille en tout.
— Non, tu fais erreur, imbécile. Mille quatre cents euros, quatre mille deux cents en tout !
— Hélas non, père…
— …(Edmond devint cramoisi). Mais qu’est-ce que c’est que cette arnaque ? Tu me prends pour Rothschild ? Non, mais c’est inouï, on manque de cadres supérieurs en France et on ne forme que les fils de riches ! Et toi ? Tu ...

... n’aurais pas pu te renseigner AVANT ? Hein ? Et tu crois que je vais les trouver où, ces quarante mille euros ? Sous les pattes d’un cheval ? Le prix d’une voiture de luxe… Mais je rêve…
— …(C’est Béa qui est écarlate maintenant, tous deux le nez dans nos assiettes.)
— Ça ne va pas se passer comme ça. Je vais en parler à mon ami le député. C’est impensable. Que fait le gouvernement contre ce racket ignoble. D’abord, ce pognon tu vas le gagner. Dès demain à huit heures, je veux te voir dans l’entreprise et tu vas bosser, sans salaire.
— C’est illégal, si tu as un contrôle…
— Non, mais je rêve ! C’est une grève ? Tu es syndiqué ? Ah, on vous en colle des belles dans la tête…
— Doudou, tente Béa, Jérôme a fait de réels efforts et il a merveilleusement réussi. Laisse-lui un peu de repos, au moins le temps de passer son permis.
— L’argent de ce permis ira dans les poches de ces truands de HEC, comme ses salaires.
— Mais c’est moi qui lui offre…
— Ah, vous me dégoûtez, tous les deux ! Tiens, je n’ai plus faim.

Il quitte la table en fureur. Béa cherche à atténuer le problème, comme d’habitude.

— Ne t’inquiète pas, demain l’orage sera passé, il va réfléchir. Et crois-moi, il peut très bien assurer ces frais sans que nous ayons à nous priver. Il n’y aura pas de vacances à Royan cette année, c’est tout. Dommage…

On ne le revoit plus jusqu’au lendemain matin. Je me tiens prêt dès sept heures et demie pour l’accompagner éventuellement au boulot, histoire de ne pas en ...