C'était lui, c'était moi
Datte: 13/08/2018,
Catégories:
fh,
cérébral,
revede,
exercice,
confession,
mélo,
nostalgie,
portrait,
Auteur: Cheminamants, Source: Revebebe
... instant qu’il puisse les partager avec un autre mâle. Je l’observe un peu : grand, les épaules larges, moulées dans un tee-shirt qui rajeunit sa cinquantaine virant au six.
— Alors, ce grand méchant, il est parti ? C’est vous qui l’avez quitté ? Quand ça ?
— Ce matin.
— C’est vrai que là, vous me battez ; moi, c’est ma chérie qui est partie il y a un petit mois. Alors je vous propose de trinquer à « nous » ! Et je vais vous embrasser pour vous dire que vous êtes jolie.
— Eh bien… non !
— Une seconde d’hésitation équivaut à un « oui » récalcitrant, mais un « oui » quand même, avec une tonne de questionnements de femme qui vous mènent à rien. Laissez-moi vous montrer que c’est beau de vivre, qu’une bouche d’homme sur la vôtre ne vous enlèvera pas votre petit côté « On ne me la fait pas à moi ; je suis une femme sérieuse, Monsieur ! ».
Je ris devant son air à la caricature maniérée. Il continue de la même manière, comme s’il exprimait mes pensées :
— « Vous alors, Didier, vous avez un sacré culot ; vous êtes bien comme tous ces hommes qui ne doutent de rien et qui s’engouffrent dans la brèche, dès qu’ils en voient une toute fine qui porte une jolie robe. »
Il a rapproché sa chaise. Je ne bouge pas. Je ne dis rien. Il reprend son propre personnage et répond à son argumentation qui se veut féminine :
— Mais voyons, euuuh… votre prénom? en s’adressant à moi.
— Marie !
— Mais voyons, Marie, jamais je ne me permettrais de bafouer votre chagrin, ni de vous ...
... manquer de respect. Vous êtes libre de refuser mes trois « oui ».
Puis en jouant mon rôle :
— « Comment ça, troisoui alors que vous parliez juste d’un petit baiser ? »
— Mais jamais je ne vous ai proposé de vous satisfaire d’un petit baiser ; j’ai juste dit que j’allais vous embrasser. Voudriez-vous que je néglige vos lèvres, alors que vous les avez pulpeuses et qu’elles méritent les miennes ; ainsi que ma langue.
Il fait comme si j’étais dégoûtée :
— « Bahhh, et avec la langue, en plus ! Vous n’y pensez pas, j’espère ? »
Puis comme s’il répondait :
— Bien sûr que si ! Ma langue frôlant vos lèvres pour qu’elles s’entrouvrent, c’est le minimum. Ensuite, vous lui laisserez le passage entre vos rangées de dents toutes blanches. Un baiser doux, profond, nos langues se cherchant, se caressant pour un instant de plaisir. Sans faire de mal à personne, et surtout pas à vous-même : c’est le début du « bien » quand on a mal.
Je m’exclame :
— Oui ! Didier, enlevez-moi le goût de sa salive !
Et j’en ai presque oublié, l’espace d’un instant, qu’après ma douche je me suis brossé, brossé, brossé les dents pour nettoyer désespérément tous les mots que j’avais dans la bouche. C’était pour les empêcher de sortir au milieu du dentifrice, les mots cruels, pleins de douleur, des méchants, remplis de hargne et de désespoir, de colère aussi, pour le maudire, lui, de cet échec.
Didier se penche. Je ferme les yeux et je serre mes poings l’un dans l’autre sur le creux de ma ...