La légende du cavalier noir
Datte: 12/08/2018,
Catégories:
alliance,
vengeance,
nonéro,
historique,
aventure,
contes,
Auteur: Pierre Siorac, Source: Revebebe
... fantôme souffrant dans son fauteuil, l’homme qu’il avait été.
Ce gentilhomme catholique avait durant ses années de jeunesse administré ses terres avec une rigueur et une justice toute protestante. Son esprit ouvert et sa bonhomie naturelle en avait fait un seigneur aimé de ses gens.
Lorsqu’avaient éclaté les guerres de religion, Aldemar s’était toujours efforcé de réconcilier les deux camps dans ses domaines ; et grâce à son art de la négociation, aucun conflit majeur n’avait jamais ensanglanté sa province.
Il s’était marié tôt, à l’âge de 26 ans ; un grand et bel amour, sincère et partagé celui-là. Hélas, la première dame de Merville mourut en couches en mettant au monde le petit Pharamond, que dès lors Aldemar chérit pour deux.
En 1590, à 40 ans passés, il faisait partie de ces seigneurs fidèles à Henri III, qui à sa mort avaient pris le parti d’Henri de Navarre, l’héritier légitime. C’était lui qui, durant le siège de Paris, avait murmuré au Béarnais qui refusait de faire couler le sang des Parisiens « Dans ce cas, Sire, Paris vaut bien une messe… »
« Ventre Saint Gris, Merville, répondit le roi de France, voilà des mots qui resteront dans l’Histoire ! »
Pendant les vingt ans qui suivirent, il avait dirigé la diplomatie secrète du roi, mis au point l’édit de Nantes, et surtout calmé les fureurs des innombrables cocus du Vert-Galant.
Puis il était retourné vieillir paisiblement sur ses terres après l’exécution de Ravaillac. Il avait alors plus de 64 ...
... ans, et il était temps pour lui de goûter un repos bien mérité.
L’évocation de tous ces souvenirs avait permis à son esprit discipliné de faire diversion et ne pas entendre les cris des deux créatures qui souillaient le lit familial. Ce lit sur lequel le petit Pharamond avait été conçu, et dans lequel sa bien-aimée était morte. Il puisa au fond lui ce qui lui restait de force… Il tiendrait bon. La guerre lui avait appris que le vainqueur était toujours celui qui était capable de s’accrocher le plus longtemps au terrain, en attendant que le sort décide de la victoire.
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Le chevalier Pharamond Charles Henri de Merville embrassa tendrement sa femme avant de monter à cheval. Il lui déplaisait fort de la quitter, ne fût-ce que pour deux jours, mais il n’avait jamais manqué d’être présent au château paternel le jour de l’anniversaire du comte. Sa tendre Rose l’accompagnait d’habitude. Mais ayant appris l’accident grave de son père, il ne souhaitait pas que ce dernier se sente gêné par le regard empli de larmes et de pitié que ne manquerait pas de lui jeter sa tendre moitié.
Rose était une de ces femmes qui portaient leur nom avec autant d’honneur que de bonheur. Sa petite taille cachait un grand caractère ; ses yeux verts d’une infinie douceur en temps de paix (c’est à dire, lorsque Pharamond lui cédait tous ses caprices) savaient lancer des éclairs de feu lorsque la situation l’imposait, et son âme était belle, et son cœur était pur, et son corps… était ...