Toute ma vie j'ai rêvé
Datte: 23/12/2021,
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Auteur: Calpurnia, Source: Revebebe
Ambert est une petite ville du Puy-de-Dôme surtout connue pour sa fourme persillée, au bleu plus marqué de celle de la voisine Montbrison. Dix mille habitants et guère de charme, en fait, surtout à la fin de l’automne où j’y retourne trente ans après l’avoir quittée.
Il est dix-neuf heures à l’horloge de l’église voisine. Lentement, je tente de tourner la clé dans la serrure avant de me rendre compte que la porte de la maison que je viens d’acquérir n’est pas verrouillée. Les volets sont restés fermés – du moins, ceux qui ne sont pas cassés. La maison semble morte, bloquée dans un temps suspendu au-dessus des années qui s’écoulent sans elle. Telle qu’en mes souvenirs, l’entrée est monumentale ; elle me donne l’impression de pénétrer dans une église abandonnée. Une odeur de poussière, d’humidité et de larmes anciennes… Mes bottes aux semelles de crêpe me permettent d’avancer sans bruit, heureusement, car je ne veux pour rien au monde perturber le silence quasi religieux de trois décennies d’absence. Les bruits de la circulation s’étouffent quand je ferme la porte. Bienvenue dans mon passé, semblent me dire ces murs sombres.
J’entame le tour du propriétaire, ce que je suis devenue depuis ce matin, quand le notaire m’a remis les clés. Pas d’électricité, bien sûr. Oui, j’ai bien hérité de cette maison que ma cousine Léa m’a léguée dans son testament. Le cancer l’a emportée à quarante-huit ans, le même âge que le mien. Pour moi, elle n’a pas vieilli : elle gardera ...
... éternellement les dix-huit ans que nous avions lorsque nous avons été séparées. Cette bâtisse est à l’image de mon cœur : en ruines, longtemps après une époque de splendeur.
Les escaliers de bois craquent sous mes pas. Je frissonne du froid auvergnat qui semble avoir pris possession de ces lieux. La lumière ténue qui vient de l’extérieur me permet à peine de voir où je pose mes pieds. Cette odeur… si ancienne, et pourtant si familière ! Elle est indissociable à la fraîcheur du petit corps rempli de vie de la jeune Léa, si pétillante lorsque je la tenais dans mes bras ! Nos étreintes me reviennent en mémoire. Un sanglot me monte à la gorge. Je n’y vois plus rien, et m’assieds sur les marches pour ne pas trébucher. Le vent à travers les claires voies des volets parvient à peine à couvrir les battements de mon cœur. Que fais-je ici après tant d’années ? Quelle folie d’avoir accepté cet héritage : une maison aussi vaste et en si mauvais état !
Une fois mes yeux accoutumés à la pénombre, je me relève et reprends ma visite. La demeure possède deux étages. Je monte jusqu’au dernier. Dans le couloir, un bruit m’arrête. Comme un gémissement. Il provient d’une chambre dont la porte n’est qu’à demi fermée. J’avance avec prudence, à pas de louve. Sans doute des squatteurs. Je jette un coup d’œil prudent.
Je vois deux filles couchées ensemble sur un lit. Plutôt jeunes : pas plus de vingt ans. Nues, toutes les deux. Une blonde et une brune. La première lèche la vulve de la seconde dont la ...