Un conte de Noël - Histoires de Sexe

Un conte de Noël

Léo et Lola se promenaient côte à côte dans le parc ; ils jouaient un peu, mais le cœur n’y était pas. Lola venait de fêter son cinquième anniversaire ; Léo la devançait de quatre mois. Ils étaient amis depuis leur plus jeune âge, alors qu’ils faisaient leurs premiers pas sur cette même pelouse, encore patauds et maladroits.

La veille, elle lui avait annoncé la triste nouvelle.

— Tu sembles bien sûre de toi.
— Elle n’a pas dormi de toute la nuit. Je crois que nous allons devoir quitter notre appartement ; j’ai entendu un mot qui l’a terrorisée : expulsion.
— Tu exagères peut-être…
— Elle a téléphoné plus d’une heure à tatie Marie, elle pleurait.

Léo resta quelques instants songeur. La perspective de perdre son amie le rendait nerveux et même agressif, aussi lorsqu’il vit s’approcher Max, il lui jeta un regard noir, tout heureux à l’idée de se défouler sur quelqu’un.

Max, un petit teigneux qui cherchait des noises à tout le monde – surtout aux plus faibles – s’éloigna, prudent. Ce sale individu s’était permis des privautés avec Lola ; mal lui en avait pris : Léo lui avait flanqué une rouste mémorable ! Depuis, ce morveux évitait Léo, question d’amour-propre et de bon sens.

— Je crois que nous avons un répit jusqu’au printemps prochain, fin mars si j’ai tout compris. Après, c’est fini.

Il avait retourné le problème dans tous les sens, et ce dimanche après-midi, il tremblait d’excitation : il croyait détenir la solution.

— Cette nuit, j’ai eu une ...

... idée.
— Ne me dis pas écrire au Père Noël, j’y crois plus.

Tout heureux de surprendre sa copine, il fit durer le suspense.

— Allez, raconte…
— S’ils vivent ensemble, tous nos soucis disparaissent.
— Tu veux qu’ils se rencontrent, qu’ils deviennent plus qu’amis ? Nous nous connaissons ; eux, non. Ils ne se sont jamais adressé la parole, ni même croisés. Comment veux-tu faire ?
— Nous allons les piéger, forcer le destin. Jouer au Père Nowel.

Lola réfléchit pendant plusieurs minutes. Plus elle y pensait, plus elle trouvait l’idée séduisante.

— Quand veux-tu commencer ?
— Pourquoi pas aujourd’hui ? Ça va bientôt être Nowel ; ce serait bien qu’on le passe ensemble.

Léo avait toujours eu des difficultés avec l’élocution de cette fête, ce qui la faisait rire.

— Tu te rends pas compte, il nous faut trouver un moyen pour les faire se parler dans l’heure qui vient car ils vont bientôt nous appeler pour rentrer chez nous.
— On se planque et on avisera. Il faut improviser.
— C’est de qui, cette stratégie ? Jules César, Alexandre, Napoléon ?
— O’Maley, dansLes Aristochats.
— Je le sens mal, ce truc, je le sens mal…
— T’inquiète, laisse faire le maître.

~o~

Vincent replia sa revue et regarda autour de lui. Des enfants couraient de ci de là, accompagnés par leurs parents ; des mémères à chiens-chiens promenaient leurs toutous, mais aucune trace de Léo.

« Quel idiot je fais ! » se dit-il, inquiet. Il avait passé trop de temps à lire sans s’intéresser à ce qui se ...