1. Ardente Afrique


    Datte: 23/09/2021, Catégories: couleurs, cérébral, Voyeur / Exhib / Nudisme confession, initiatiq, Auteur: Elodie S, Source: Revebebe

    ... dont la tête est cernée d’un bandeau. Il a dû venir se faire opérer à Bangui.
    
    J’ai un petit pincement au cœur quand j’aperçois son coucou. Il a dû faire le débarquement en 44 ! Sam m’installe directement à ses côtés, à côté du manche à balai, et les autres passagers prennent place sur les deux rangs de sièges à l’arrière. Lorsqu’il lance l’hélice, toute la carcasse de met à trembler. J’essaie de cacher mon appréhension. Nous roulons sur le tarmac, l’avion prend la piste, j’ai l‘impression qu’il n’arrivera jamais à décoller. Il finit par s’élever lentement, je contemple l’urbanisme anarchique de Bangui.
    
    Malgré un bruit étourdissant, Sam me parle pendant l’heure et demie de vol. Entre son accent à couper au couteau et le vacarme, j’arrive à comprendre qu’il pilote sur les lignes locales depuis plus de quinze ans, qu’il est très seul à Bangui, car sa famille est restée au Cap… et qu’il aimerait bien m’inviter à passer une soirée avec lui. Je lui explique les principaux objectifs de ma mission. Il a un sourire entendu en me souhaitant bon courage. Je serre les fesses à l’atterrissage, la piste a des nids de poule qui secouent l’avion comme un prunier, mais nous gagnons, finalement sains et saufs, le petit bâtiment qui sert d’aérogare.
    
    Alors que Sam décharge les valises du coffre à bagages, les gens accourent vers l’avion. J’entends mon nom. C’est un homme rondouillard, avec une petite bedaine, qui me tend la main en se présentant comme Saïd. Il a de petits yeux ...
    ... enfoncés, incroyablement mobiles, et porte une saharienne ocre. Il prend mes valises et je le suis, après avoir salué mon valeureux pilote. Sa voiture est garée sur le parking des officiels devant l’aéroport. Elle contraste avec les autres véhicules : c’est une luxueuse Mercedes aux vitres teintées. L’air conditionné y diffuse un havre de fraîcheur.
    
    Saïd m’informe que le taxi-brousse pour Daouda, mon terminus, partira demain en fin de matinée, et qu’il faut compter au moins cinq heures depuis pour faire le 70 km de piste. Nous compléterons préalablement mon barda dans son dépôt. Il me loge chez lui ce soir, car il n’y a pas d’hôtel décent à Ndele. Il me présentera à cette occasion Leila, son épouse et Djamila, sa fille. Elles nous ont préparé un mezzé aussi bon qu’à Beyrouth, selon lui ! Il me dit avoir deux fils à l’étranger (et quatre petits-enfants), l’un gérant ses affaires à Abidjan et l’autre s’occupant des bureaux de Genève. En attendant, il me propose de visiter son entrepôt.
    
    Je suis frappée une nouvelle fois par la foule qui grouille sur la route et qui oblige mon conducteur à rouler au pas. Des camions sans âge et des charrettes tirées par des ânes bloquent la circulation. Chacun d’entre eux est bourré de sacs sur lesquels les gens, souvent des enfants, gesticulent et braillent. Je m’attends à tout moment à voir l’un d’entre eux chuter sur la route, dont le revêtement est parsemé d’énormes nids de poule. Le luxe des fauteuils en cuir du véhicule de Saïd contraste avec ...
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