1. Parfum d'inceste


    Datte: 22/06/2018, Catégories: fplusag, nopéné, Auteur: Annie-Aime, Source: Revebebe

    ... marié avec un chinois, sans enfants. Ce que je vois : un minois agréable, un corps séduisant et une sensualité pas ordinaire… Tous les soirs, je convoque la Veuve Poignet en imaginant des choses… Tous mes copains font de même.
    
    Pour sûr, on ne voit pas passer le temps en cours de physique et c’est pas la faute à Einstein. Bien sûr, la prof n’est pas sans remarquer notre distraction et nos lasers indiscrets. Elle a tôt fait d’y mettre bon ordre. En retour, on apprend à maîtriser l’ « amplification de la lumière par l’émission stimulée de radiation ». Encore que pour ma part, je sois relativement épargné, je crois qu’elle m’a à la bonne, peut-être le fait d’une certaine francophilie.
    
    Mon assertion n’est pas lancée à la légère : je crois réellement qu’elle m’a à la bonne. Jugez plutôt : quand je n’ai pas d’autres cours après le sien, elle me retient pour à nouveau me seriner la leçon si je l’ai mal assimilée. C’est grâce à elle si mes résultats sont honorables.
    
    C’est tout bénef et en plus j’en tire gloire. Les persiflages admiratifs des copains clament mon triomphe. Moi en retour je parade et mime le jeune coq dévergondé, donnant à croire des balivernes dont ils ne sont pas dupes mais il me suffit d’en donner l’illusion.
    
    Le jour de l’événement, nous sommes seuls, la prof et moi, elle explique je ne sais quoi quand survient l’explosion : fracas assourdissant, vitres qui explosent… Elle est abasourdie, moi aussi, je ne comprends rien et mets quelques secondes à faire ...
    ... surface. Il y a d’abord un moment de profond silence, j’ai du moins ce sentiment, puis le tumulte monte, des cris percent… Tous se précipitent, nous aussi, je fonce, la prof aussi, je la devine sur mes talons. Il y a déjà du monde, tous ébahis, apeurés, immobiles à quelque distance du nuage de poussière, épais, insondable. Les particules en suspension forment comme un mur, dense, opaque, infranchissable.
    
    Pourquoi ai-je malgré tout plongé dans l’inconnu ? L’inconscience, la pulsion. Une pulsion née du néant et d’un gémissement à peine audible. Mes yeux sont douloureux, ma gorge est irritée, Je ne vois rien, j’avance péniblement, le sol est meuble, mouvant même, accidenté, parsemé de gravats. Les râles sont un peu plus distincts, j’accélère, empressement précipité autant que désordonné, je me revois en train de déblayer… Je nettoie son visage, délicatement, doucement, le mien est à quelques centimètres du sien, une femme, âgée, masque effondré, d’effroi, de souffrance ou d’épuisement, ou des trois, mais je ne comprends rien de ce qu’elle balbutie, du cantonnais sans doute, à peine un murmure, un souffle… J’appelle à l’aide… Mon souvenir est décousu, pénible… On me dira par après que la rescapée est tirée d’affaire et que je n’y suis pas pour rien.
    
    Que s’est-il passé ? On me montre des égards, on m’explique dans un anglais approximatif : une explosion ou plutôt l’implosion du silo à grain, des dégâts considérables, dix-sept morts, beaucoup de blessés. Ce genre de catastrophe ...
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