1. rioriM


    Datte: 14/05/2018, Catégories: frousses, nopéné, nonéro, sorcelleri, fantastiq, Auteur: Radagast, Source: Revebebe

    ... n’en sont pas moins redoutables, aussi tranchantes que l’acier le plus pur, aussi tranchantes qu’un haïku.
    
    En passant devant le miroir, je vois mon reflet. Il me semble qu’il se déplace avec un léger temps de retard. Illusion d’optique, ou fatigue, je n’y prête guère attention.
    
    Une fois ma douche prise, et un léger repas vite expédié, je me pieute.
    
    Dans le noir, cette maison semble vivre, craquements et trottinements retentissent de partout. Je n’aime guère les bâtisses tout en béton, sans âmes, sans histoires, insipides. Je suis servi.
    
    ooOOoo
    
    Le lendemain je vais chercher le journal au bar/bureau de tabac du village, autant pour me tenir au courant de l’actualité que pour rencontrer les figures locales, ceux qui connaissent toute l’histoire et les histoires du coin.
    
    Le nom du lieu me plaît,La Verge Galante. La Verge étant la rivière qui traverse le patelin, je pense avoir affaire à des poètes, ou des pêcheurs.
    
    Un comptoir en bois où sont accoudés quatre gars aux trognes enluminées, un guichet destiné aux achats de journaux et cigarettes ; une dizaine de tables en marbre et pieds en fonte entourées de chaises en skaï rouge craquelées. Les murs sont couverts d’affiches de fêtes votives, de compétitions de pêche, d’équipes de foot inconnues, de coureurs cyclistes oubliés.
    
    Un grand miroir piqueté de crottes de mouches semble agrandir la salle.
    
    Sitôt entré dans le bistrot, les conversations s’interrompent, l’assemblée m’observe. Jeunes, vieux, tout le ...
    ... monde me dévisage. Il y a ceux qui fonctionnent encore au café, ceux qui marchent au demi pression, ceux qui se travaillent la cirrhose au ballon de blanc ou de rouge, et les derniers, qui en sont déjà à l’apéritif.
    
    Je prends un journal dans le présentoir et commande une pression. La clientèle se répartit un peu partout, au comptoir ou aux tables.
    
    Ils refont le monde, commentent l’actualité et devisent des derniers potins du patelin.
    
    Le dernier potin en date étant ma petite personne.
    
    — C’est toi, gamin, qu’as acheté le manoir ?
    — Oui.
    
    Je me fais interpeller par un vieillard étonnant assis à une table. Une chemise noire, les manches relevées sur des avant-bras noueux comme des branches d’olivier. Les cheveux longs et blancs, la barbe fournie, une tache jaunâtre colore le dessous de son nez et ses lèvres. Il joue avec un verre de pastis vide.
    
    — Viens t’asseoir.
    
    Il tapote le siège devant lui avec sa canne. Si je veux me faire bien voir de cet aréopage, autant discuter avec celui qui semble mener la bande.
    
    Je pose mon fessier sur le siège en face de lui.
    
    — Pourquoi t’as acheté cette bicoque ?
    — Je cherchais un coin tranquille.
    — Pourquoi ?
    
    Pourquoi doit être son mot favori.
    
    — Je suis écrivain, il me faut du calme. Quand on m’a proposé ça, j’ai sauté sur l’occasion.
    — Ça ne t’a pas étonné de trouver une maison pareille si peu chère ?
    — Un peu… mais elle est bien conservée, bien exposée. Comparée aux autres maisons en vente dans la région, le ...
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