Véronique
Datte: 10/01/2021,
Auteur: Patrik, Source: Revebebe
... sache pourquoi, des gens qui ont une vie de comédie et qui ne le savent même pas. Ils s’agitent dans leur petit théâtre, font de belles révérences, quelques bons mots puis le rideau se baisse et le néant revient.
Parfois, ils ont de drôles de cadeaux pour moi et c’est dommage. Les hommes et leurs envies, les femmes et leurs médisances. Les uns me veulent et me méprisent en tant que femme, les autres m’en veulent et me méprisent en tant que femmes.
Je connais mes ennemis, ils ont le temps et le goût de gâcher ma vie.
Ma vie, c’est vite dit. Maintenant que les enfants sont grands, après une ultime vexation, une ultime humiliation, je suis partie. Sa maison, ses affaires, sa chose, lui qui avait daigné me sortir de l’Assistance ; de toutes façons que des empotées, des idiotes, des traînées. Si lui n’était pas intervenu, dieu seul sait ce que je serais devenue : une droguée, une prostituée. J’étais sa créature, je lui devais tout. Ravalant mon reste de fierté, j’ai osé aller taper à la porte d’une assistante sociale. Je ne voulais pas, je voulais m’en sortir par moi-même. Ma plus grande victoire fut alors de comprendre qu’il fallait parfois accepter l’aide d’autrui.
Drôle de vie, drôle de gens, drôle de pays.
J’ai à présent un petit appartement dans une cité peu reluisante mais c’est mon chez moi. Pas grand-chose, un loyer qui ponctionne beaucoup le maigre salaire que j’ai mais c’est à moi. Vingt ans pour ça seulement, c’est rageant mais j’ai toujours été la seule ...
... à travailler réellement, j’ai été femme de ménage, tôt le matin ou tard le soir, pas très reluisant mais des sous quand même en fin de mois. Lui, il avait plein de projets, un magasin d’antiquité qu’il a fini par ouvrir avec ce que j’avais pu mettre de côté. J’avais alors plein d’espoirs, quitter cette vie de mains dans l’eau sale et puante, être entourée de belles choses anciennes, derrière un comptoir, une caisse, devenir presque une dame bien.
Enfin devenir quelqu’un, la tête hors de l’eau. Ce fut pénible pour ouvrir ce magasin, son magasin, comme il le disait si bien, même si ce fut grâce à mon maigre salaire et surtout à ce que j’avais réussi mettre de côté sans qu’il le sache qu’il put l’ouvrir. Moi aussi, je rêvais d’autres choses, des choses fort simples comme des habits neufs pour mes enfants, des cadeaux, des facilités de vie. Ce magasin d’antiquités était comme un Eldorado, mon Amérique, ma chance à moi.
Depuis qu’il était devenu quelqu’un en vue, un commerçant, il passait encore plus de temps dans les bistros, payant des tournées avec le futur argent qu’il allait gagner…
Ce qui devait arriver arriva, le magasin fut saisi, d’autres dettes, d’autres traites, rêves brisés. Il me le reprocha et pas seulement en paroles. Je ne disais rien, pour les enfants. Il crut qu’il avait raison et me le reprocha plus encore. Je serrais les dents.
Il y a des jours, où je n’ai plus de raison, plus d’horizon, plus de religion et plus d’amis…
Rien que du néant, je suis ...