1. Mon Ange a un sexe...


    Datte: 29/12/2020, Catégories: fh, fplusag, jeunes, couleurs, profélève, bain, douche, cérébral, 69, confession, inithf, Auteur: Elodie S, Source: Revebebe

    Cette classe de soutien à des élèves en difficulté arrondit sans conteste mes fins de mois. Évidemment, au lieu d’avoir des quatrièmes, j’ai des élèves de première et terminale ; mais comme ils sont peu nombreux, je peux consacrer plus de temps à chacun d’entre eux. En outre, l’échange est plus intéressant qu’avec des pré-ados. Ils sont huit, trois filles et cinq garçons ; leur cursus scolaire laisse à désirer, et je me dois d’adapter ma pédagogie à leur niveau, mais aussi à leurs centres d’intérêt. Le plus âgé, Mouloud, n’a que sept ans de moins que moi, les plus jeunes dix-sept ans. Je me sens parfois dévisagée davantage comme une femme que comme une enseignante. Reflet des difficultés d’intégration des populations d’origine immigrée de la troisième couronne parisienne, leur goût pour les études est plus que limité. En outre, la seconde langue a des coefficients réduits lors des examens.
    
    Les trois filles, Leïla, Rachida et Yasmina rivalisent de mauvais goût pour s’habiller et passent leur temps à minauder et à allumer les garçons. Mouloud se conduit en chef de classe (de gang ?) et j’ai bien compris que c’est avec lui qu’il me fautnégocier pour avoir une certaine autorité et le calme pendant mes cours. J’ai dû par exemple accepter de leur faire lire et traduire des articles sur des matchs de foot, ou leslâcher dix minutes avant l’heure certains vendredis de matchs. Trois autres garçons, Farid, Ahmed et Dieudonné sont plutôt suivistes et je parviens à peu près à les ...
    ... raisonner individuellement.
    
    Le huitième, Valentin, est un cas à part. J’ai été sensiblement plus sévère avec lui qu’avec les autres par le passé, car il avait visiblement un potentiel de réussite supérieur, mais il déconnectait fréquemment. En fait, j’ai réalisé récemment que ses difficultés scolaires ne viennent pas de son milieu familial, mais des meurtrissures de la vie. J’ai découvert dans son dossier scolaire qu’il avait perdu parents et frère dans un accident de voiture, et qu’il lui avait fallu deux ans, en raison des traumatismes qu’il avait subis, pour retrouver une scolarité plus ou moins normale. Son cas m’a émue, et son niveau souffre plus de lacunes de base que de désintérêt pour les langues. Il habite chez ses grands-parents, a une vie probablement plus rangée et ne jouit assurément pas deslibertés nocturnes de ses camarades.
    
    Lorsque les cours avec eux ont lieu le lundi, j’ai le droit pendant quelques minutes au compte rendu de leursexploits du week-end, que je dois accepter comme sas de décompression avant de pouvoir quelque peu les intéresser. Leur vocabulaire (en français comme en langues) est des plus réduits, fleuri d’expressions argotiques dont certaines me sont totalement étrangères. Heureusement, lorsque leur attention fléchit trop, l’écoute d’un slam en espagnol relance parfois leur intérêt ; je garde en général cette méthode pédagogique pas vraiment reconnue par l’Éducation Nationale pour les fins de cours. Ce qui a le mieux marché, c’est l’idée que ...
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