Aventuriers et diplomates
Datte: 24/11/2020,
Catégories:
nonéro,
historique,
Auteur: Pierre Siorac, Source: Revebebe
... instinctif, qui jugeait rapidement ses interlocuteurs en les regardant franchement dans les yeux. Il accordait toute confiance à ses amis, mais ne ressentait aucune pitié envers ses ennemis. Il méditait ses plans pendant quelques heures au maximum, puis agissait vite, souvent sans en référer à quiconque afin de ne pas perdre de temps dans d’interminables explications ou tergiversations qui étaient risques de laisser passer le moment opportun pour l’action.
Bref, un diplomate chevronné accompagné d’un homme d’action faisaient route vers Paris, et ce voyage allait durer trois bonnes journées. Sillery avait donc le temps d’informer le chevalier sur les usages de la cour, les partis en présence et les dangers qu’ils auraient certainement bientôt à affronter.
— Dites-moi, Nicolas, lorsque vous êtes venu nous rendre visite hier, vous saviez ce que vous alliez trouver, n’est-ce pas.
— Je dirais que je le pressentais…
— Racontez-moi donc cela.
— L’enlèvement de votre père a fait grand bruit, et la comtesse de Merville a promis une forte récompense à celui qui lui rendrait son mari et lui livrerait vivant le cavalier noir.
— Ah… Savez-vous à quel point cette femme est un monstre ?
— Cette conclusion s’impose, en effet… à condition d’être loin d’elle et de pouvoir garder les idées claires. Cette femme est effectivement redoutable.
— Je serais heureux de suivre le cheminement de vos pensées.
— Eh bien, comme vous le savez, le cavalier noir était une de mes vieilles ...
... connaissances, dit Sillery en souriant, et je savais qu’il était impossible à votre père de se dédoubler ainsi. Or, le mode opératoire était en tous points semblable à celui qu’il employait : aucune pitié pour les imbéciles, et des scrupules à attenter à la vie des femmes. Vous connaissez l’adage « Bon sang ne saurait mentir » ; j’en ai donc conclu que c’était vous qui aviez revêtu les habits du vengeur.
— Et donc vous saviez que mon père était chez moi.
— Comme je vous l’ai dit, je le pressentais, fortement.
— Comme vous pressentiez que je vous accompagnerais, n’est-ce pas…
— Vous noterez que je n’ai pas formulé cette requête, Pharamond.
— C’est sans doute votre art de la diplomatie qu’il va me falloir apprendre.
— Gardez-vous en chevalier. Il est important que nous soyons les deux faces opposées d’une même pièce pour affronter les événements qui vont arriver. Nous rencontrerons le roi très bientôt ; il est entouré de serpents qui tous se targuent d’être de bons conseillers. Chacun y va de ses arguments plus ou moins insidieux, et Louis n’a que seize ans. Il y a fort à parier que le doute le ronge sans cesse… Par contre, votre bonhomie, votre faconde, votre franchise, votre manière directe de parler aux hommes pourraient alors agir sur lui comme un coup de fouet et se révéler grandement utiles.
— Et Concini ?
— Ce fat se prend pour le duc de Guise… Il en a la même arrogance ; il périra comme lui.
— Vous voulez dire assassiné ?
— Vous avez lu la lettre de Luynes, comme moi ...