Saint Matthieu et l'ange
Datte: 15/10/2020,
Catégories:
fh,
hplusag,
religion,
Collègues / Travail
revede,
pénétratio,
Auteur: Lizbeth, Source: Revebebe
... pas moi-même. Au contraire !
Je parviens à sortir de la pièce et m’éloigne dans le couloir.
— Je vous l’ai dit hier, me rattrape-t-il. Je ne suis pas un ange, je suis un homme.
Alors, je fais l’effort de le regarder, et je suis triste. Je suis triste de la réalité de ce que je vais lui dire.
— Vous n’êtes pas juste un homme, frère Matthieu. Vous êtes un moine. Et je ne peux rien contre ça.
J’ai défait le premier bouton de ma chemise. Je sais que cela fait plus « détendu ». J’ai eu du mal. À quelqu’un qui s’engage dans le mariage, tout comme à quelqu’un qui s’engagerait dans les ordres, je dirais : « Ne pas sous-estimer le divorce, ne pas sous-estimer le retour à la vie sociale. » Cela ne les empêcherait sûrement pas de s’engouffrer dans ces geôles. Tant pis pour eux.
Octobre est tombé. Brûlant au début, comme le chant du cygne d’un été agonisant, et glacé sur la fin.
La ruelle est étroite, balayée par un vent de ville. Il y a un pot, avec de la menthe, devant l’entrée de chez elle. Il faudra que j’y pense, moi aussi, à fleurir ma porte.
Je ne sais pas si elle sera là. Il est seulement seize heures. C’est l’heure du thé.
Tant pis. De mon doigt, j’écrase la sonnette. Je passe une main dans mes cheveux que je n’ai pas coiffés. J’ai l’air bien bête, à présent, les mains fourrées dans les poches de mon blouson trop neuf. J’aurais peut-être dû acheter des fleurs, mais je me suis dit que j’aurais eu l’air encore plus bête.
Je sonne une seconde fois, ...
... juste avant d’entendre des pas dévaler des escaliers et un « j’arrive ! » La poignée de la porte s’agite. Je crois percevoir une injure marmonnée, et la clef finit par tourner dans la serrure. La porte s’ouvre.
Voilà, elle est là.
Qu’est-ce que je fais, maintenant ? Qu’est-ce que je dis ?
Quand elle m’a vu, ses yeux café se sont écarquillés derrière ses lunettes. J’avais l’avantage de la surprise, mais je n’ai pas su en profiter.
— Bonjour, lance-t-elle.
Franchement, il y a vingt ans, j’aurais dit que je la trouvais canon, dans son pull trop grand. Maintenant, je suis juste impressionné.
— Je peux entrer cinq minutes ? j’ose.
— C’est possible.
Je la suis dans une pièce, sur la droite.
— J’ai fait du thé. Tu en veux ?
Elle me tutoie. C’est peut-être normal. Je pose mon blouson sur une chaise. De sa cuisine, qui communique avec le salon, on voit une petite cour intérieure. Tendance décoration, il y en a un peu partout ; mais surtout, il y a une grande bibliothèque, et des livres de ci, de là : sur des étagères, sur la table du salon, sur la table de la cuisine, sur le comptoir, dans une panière.
— Tu travailles ici ? je lance, pour meubler.
— Mon bureau est en haut. Je suis sur une publication. Sur ton monastère, d’ailleurs.
Elle me jette un regard fuyant.
— Tu es en permission ? questionne-t-elle avec un sourire.
Elle m’invite à prendre place sur un gros fauteuil du salon avant que j’aie eu le temps de répondre quoi que ce soit, puis vient ...