Terre des hommes (1)
Datte: 17/09/2020,
Catégories:
Erotique,
Auteur: Anthynéa, Source: Xstory
Lentement la terre se réveillait. Le long hiver se diluait dans les premiers bourgeons. Les prés reverdissaient et déjà, les têtes effilées des pousses de jonquilles dépassaient du sol. Encore une ou deux semaines et les boutons allongés éclateraient pratiquement tous en même temps. La nature reprenait ses droits et la marée jaune afficherait les couleurs d’un printemps synonyme de renouveau.
La cheminée fumait, comme pour montrer aux passants égarés, que la maison vivait-elle aussi. Un peu plus à gauche, serpentant dans un vallon creusé au fond du pré, le ruisseau aussi chantait les louanges d’un soleil plus chaud. Depuis la terrasse qui surplombait le minuscule ru, une brune assise sur un transat, savourait la moindre parcelle d’une chaleur bienveillante. Emmitouflée dans une couverture, pour éviter les courants d’air toujours possible, ses regards semblaient se repaître de cet infini paysage. Celui qui quelques jours auparavant n’était encore qu’une mer blanche.
La neige avait fondu et quelques touffes de perce-neige aux clochettes visibles de loin, trouaient le vert changeant de cette herbe qui rajeunissait déjà. Un livre ouvert sur les genoux, Marie-Anne soupira. Qu’ils étaient précieux ces petits moments d’un calme presque parfait ! Sous la couverture, sa poitrine se gonflait d’un vrai plaisir tout simple. Le grand air et le redoux, voilà qui la mettait en joie. Une sorte de large sourire apparut sur son visage.
Elle se redressa, se relevant pour prendre pied ...
... sur les dalles posées là, depuis… bien des années. De la couverture de laine repoussée, Marie-Anne émergeait avec une envie de se dégourdir les jambes. En deux enjambées, elle foulait l’herbe, se dirigeant d’office vers la faille que faisait le ruisselet. Précautionneusement, ses pieds nus s’enfonçaient dans un tapis humide et lentement elle s’approcha du ruban liquide. Un remous se dessina alors qu’un trait sombre zébrait le fond couvert de sable blond de la goutte d’eau claire.
Elle tenta désespérément d’entr’apercevoir la jolie tachetée qui venait d’être dérangée dans son antre fluide. Une truite Fario avait regagné un coin plus reculé de la cascade où elle séjournait, se mettant bien à l’abri d’une éventuelle ennemie. La femme, plus vraiment jeune assurément, mais pas encore âgée resta un long moment comme figée, s’imaginant sans doute, revoir cette habitante de l’onde. Son père et son grand-père avaient gardé cet endroit aussi intact que possible. Maintenant c’était son fief et elle perpétrait, à son tour la tradition…
Christophe allait venir la rejoindre et sa solitude prendrait fin avec son arrivée prévue en début de soirée. À quarante ans, elle vivait une vie trépidante en ville. Un travail harassant, mais qu’elle aimait, un mari dont elle restait amoureuse suffisaient à son bonheur. Mais ici, dans ce haut lieu de la famille, elle retrouvait des sensations, des odeurs et des couleurs remontées de son enfance. Le ruisseau… quels souvenirs… venaient effleurer la ...