1. La rencontre


    Datte: 26/08/2020, Catégories: f, fh, cérébral, noculotte, photofilm, odeurs, entreseins, Oral poésie, Masturbation Auteur: Louise Gabriel, Source: Revebebe

    Je construis mes histoires avec ma peau, il me faut la vérité d’un instant pour glisser dans le rêve.
    
    L’abandon charnel est un état de grâce.
    
    De la navigation dans l’inconnu d’un monde des plus virtuels, ou je ne perçois qu’à bout de mots, ou je les dépèce pour sentir. Il me faut de l’âme aussi, un corps pour vivre ça ne peut pas être totalement vide, il faut tout le reste, tout ce qui ne se voit pas, ne se dit pas tout à fait.
    
    Mais vous l’avez dit, un peu, et il a suffi de ces si simples, si évidentes paroles, si vraies, cette sorte de cri silencieux, le déclic.
    
    « Envie d’un corps ». Juste celle-ci – et le poème qui a suivi, et sa fin, ce couperet violent – je me suis dit qu’effectivement je pouvais vous offrir mon corps de bonne grâce, parce qu’elle n’attend que ça, ma peau, parce que c’est la seule chose que je puisse vous donner vraiment, au point de vous laisser entrer, glisser sur elle, en elle, parce qu’il me faut le désir de l’autre, sans lui je ne peux rien, je ne peux pas naître dans ce si doux refrain. Alors, il y a la peur qui vient se mêler au débat, je ne me lance pas dans de telles aventures tous les jours non plus, je ne suis pas sûre de moi, surtout pas.
    
    Vais-je lui plaire ou pas ? L’émotion, ça ne se commande pas, c’est fugitif, c’est un instant, un regard, un petit rien, parce que là-dedans, il n’y a plus que la séduction brute et rien d’autre, il n’y a pas la complicité de la connaissance, non, c’est rêche, sans enluminures, ça coule de ...
    ... source ou ça se fracasse d’un coup, d’un seul.
    
    Je me retrouve par un petit matin d’automne à la sortie de métro que vous m’avez indiquée et, bon Dieu ! je pourrais dans l’instant partir en courant, avec ce putain de sentiment de culpabilité chevillé au fond de la cervelle – je ne m’en départis jamais tout à fait, sans doute le prix à payer de mes libertés, ma prise de pouvoir pour l’assouvissement de mes désirs.
    
    Finalement, non, je ne pars pas à toutes jambes, ma curiosité, ma soif d’aventure, ma famine si savamment cultivée, mon excitation, mon envie du plaisir et, cerise sur le gâteau, faire des photos, moi qui déteste ça.
    
    Aussi surprenant que cela puisse vous paraître, je suis timide. J’aurais été capable de boire un verre pour me donner du courage, être un rien plus détendue. Je ne l’ai pas fait, à neuf heures du matin, c’est impossible sous peine d’être malade.
    
    Vous m’attendez en haut des marches, comme prévu. L’on se reconnaît, et… c’est étrange, j’ose à peine vous regarder. Je n’y arrive pas, c’est si subit, tout avance à la vitesse de l’éclair. Et vous fumez, génial, parce que sans cigarette pour m’apaiser cela aurait été encore un peu plus compliqué, enfin, les petits détails finissent gigantesques dans ces cas-là.
    
    Il fait frais, le soleil est magnifique, il est presque rassurant, il garantit la belle lumière pour les photos, pas besoin de flash, ouf ! Parce que les éclairages chirurgicaux, je ne sais pas, mais là c’est effrayant, je n’ai plus vingt ans, ...
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