1. La lettre


    Datte: 29/07/2020, Catégories: hplusag, nopéné, Auteur: Oxalis, Source: Revebebe

    ... observateurs.
    
    — Je suis heureux de vous avoir rencontré aujourd’hui, dit-il d’une voix douce. Je pensais justement à vous ce matin.
    
    Je lui lance un regard surpris.
    
    — Pourquoi donc ? ne puis-je m’empêcher de demander.
    
    Il sourit d’un air mystérieux. Il a toujours aimé jouer avec moi, mais je vois à présent clair dans son jeu. Je me souviens que dans sa dernière lettre il m’a parlé d’un projet de livre. Quel était donc le sujet déjà ?
    
    — Je lisais « Testament à l’anglaise », de Jonathan Coe, déclare-t-il avec amusement. Je me suis souvenu vous l’avoir prêté.
    — Ah, oui.
    — J’ai croisé monsieur Tache l’autre jour, qui m’a demandé des nouvelles de vous.
    — Je vais bien.
    
    Brève pause.
    
    — J’écris toujours, ajouté-je, en regardant au loin.
    
    Je sens son regard sur moi.
    
    — C’est vrai? insiste-t-il.
    
    Je me tourne vers lui, étonnée, encore une fois, de sa réplique.
    
    — Oui, bien sûr, répliqué-je.
    
    Et j’ai conscience de froncer les sourcils. Je tente de me composer une expression neutre. Il me sourit.
    
    — J’ai toujours su que vous n’aviez pas foi en moi, murmuré-je d’une voix teintée de reproche.
    
    Il éclate carrément de rire. Je me sens vraiment vexée, et me force à regarder droit devant moi pour ne pas lui jeter un regard meurtrier.
    
    — Ce n’est absolument pas ce que vous croyez, s’exclame-t-il subitement, me faisant sursauter. J’ai toujours essayé de vous faire comprendre que je voulais lire quelque chose de vous, mais vous n’avez jamais saisi.
    
    Je me ...
    ... sens rougir jusqu’à la racine des cheveux, et tourne des yeux gênés vers lui. Je suis mortifiée. Son regard si bleu pétille de malice.
    
    — Pourquoi ne jamais me l’avoir demandé directement ? le réprimandé-je.
    
    C’est à son tour de regarder droit devant lui, mais avec un sourire en coin.
    
    — Je ne voulais pas vous paraître trop curieux.
    
    Je me mets à rire tellement fort que des larmes perlent à mes paupières, et il se joint à moi après un moment d’hésitation.
    
    — Vous rigolez ! Je sais pertinemment que vous êtes aussi curieux que mon concierge, ne me faites pas rire ! je m’écrie entre deux éclats de rire. Je l’ai toujours su !
    
    Je m’arrête, il fait de même. Nous retrouvons notre calme.
    
    — En parlant de concierge, nous sommes arrivés, dis-je en reniflant une dernière fois.
    
    Il regarde l’immeuble, m’observe, sourit – j’ai l’impression qu’il se force à sourire.
    
    — Bon alors… dit-il d’un air de visible regret, je vais vous laisser.
    
    C’est à moi de sourire à demi. Il me scrute avec des yeux pénétrants. J’ai la désagréable impression qu’il m’implore du regard.
    
    — Vous… (je pense à la lettre, pousse un soupir) Vous…
    
    J’hésite.
    
    Il attend la suite, la tête penchée vers moi. Il a toujours été si grand…
    
    — Oui ? dit-il.
    
    Je m’aperçois alors, enfin, je réalise que… qu’il n’a aucune hâte de rentrer chez lui. Est-il seul ? Où est sa femme ?
    
    — Vous n’avez rien de spécial à faire ? demandé-je néanmoins, incertaine.
    
    Il fait mine de réfléchir, mais je le sens ...
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