1. Intermezzo - Deuxième partie


    Datte: 30/06/2020, Catégories: fh, journal, Auteur: Lilas, Source: Revebebe

    ... dire que ce n’est pas si simple que ça, mais quelque chose dans le ton de ta voix, dans ton port rigide, et ton visage fermé, m’indique que le sujet est clos. Je m’apprête à tourner les talons lorsque tu te redresses et me regardes droit dans les yeux.
    
    – Je peux te poser une question un peu personnelle ? demandes-tu.
    
    Ton air négligé me pousse soudain à me tenir sur mes gardes. Je m’appuie au chambranle de la porte de cuisine, suivant des yeux le moindre de tes mouvements. Mon souffle soudain altéré me fait prendre conscience de l’attirance que tu exerces sur moi ; comme un insecte fasciné par la lumière et la chaleur des flammes.
    
    Un violent élan, irrépressible, m’entraînerait presque à me jeter dans tes bras, alors que j’observe ta grâce féline. J’ai toujours aimé tes mains. J’aime les toucher, les lécher, les caresser. J’aime sentir leur chaleur sur ma peau, leur douceur et leur odeur lorsque tes doigts effleurent mes lèvres. J’aime les regarder, aussi. Les observer manipuler les objets de la même façon que tu manipules mon corps. Délicatement, prudemment. Pour ne pas effrayer. Pour ne pas abîmer.
    
    Lorsque je relève les yeux, tu me fixes étrangement.
    
    – Oui, dis-je seulement.
    
    – C’est un peu délicat, excuse-moi… Qu’est-ce que tu attends de la vie, exactement ? Ça m’intéresse vraiment de savoir.
    
    Je suis décontenancée. La question me prend au dépourvu. J’ignore pourquoi, mais j’attendais –j’espérais – quelque chose à caractère érotique. Peut-être parce que ...
    ... j’ai subitement envie de te faire l’amour contre cet évier en inox, sale et humide.
    
    – Je n’en sais rien, réponds-je avec honnêteté. Pourquoi tu me demandes ça ?
    
    Tu poses ta cuiller et me regardes soudain droit dans les yeux.
    
    – Est-ce qu’il n’y a pas quelque chose que tu désires le plus au monde ? insistes-tu.
    
    Je reste silencieuse un instant, réfléchissant. Peut-être qu’il y a longtemps, j’aurais eu le culot de dire que la réponse à cette question se résumait à une seule chose : l’attente.
    
    L’attente de toi, car c’étaittoi que je voulais le plus au monde. Mais les choses ont changé. J’ai changé.
    
    Je sais que je ne peux pas passer ma vie à attendre, et encore moins à attendrequelqu’un. Maintenant, j’ai appris à aimer, appris à souffrir. Appris à grandir. Ta question appelle en moi beaucoup plus de réponses que je n’aurais pu l’imaginer.
    
    Comme si tu venais de soulever en moi un point douloureux, endormi quelque part dans ma mémoire.
    
    Comme si tu venais de titiller l’endroit sensible, dont j’ignorais encore l’existence il y a quelques minutes seulement.
    
    Ce que j’attends de la vie ? Si seulement je pouvais le deviner. Telle une esquisse floue qui flotte quelque part entre mon cœur et mon cerveau, la réponse s’enroule autour de moi, m’envahit, puis se dérobe, résorbée, dispersée par un trop plein de désirs. Il y a tellement de choses que j’ai envie de faire, de voir, d’entendre et de dire. Mais est-ce que mon être penche tout entier vers un seul but ? Je ne le ...
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