1. Un merveilleux don


    Datte: 08/06/2020, Catégories: bizarre, Oral Humour fantastiqu, fantastiq, Auteur: Hidden Side, Source: Revebebe

    ... me tordait l’estomac.
    
    Tout ça collait tellement peu avec la personnalité de ma femme ! Comment avais-je pu me tromper à ce point sur son compte, et surtout depuis si longtemps ?
    
    Bien sûr, Sophie était belle. Une beauté froide qui le plus souvent la rendait inabordable. En tout cas, c’est ainsi qu’elle m’était apparue lors de notre première rencontre, dans ce bar lounge de la capitale où m’avait traîné Georges, mon éditeur. Je n’arrivais plus à détacher le regard de cette madone blonde. Au milieu de ses amis exubérants, elle incarnait le calme et la discrétion. J’en avais perdu la parole ; Georges s’en était aperçu. Il m’avait proposé de me présenter Sophie, qu’il connaissait par l’une de ses relations. Je n’avais pas su refuser, imaginant que de toute façon je serais invisible pour la belle…
    
    — Et maintenant, que comptez-vous faire ?
    
    Je dévisageais Konstantinos sans comprendre.
    
    — Faire ? Que suis-je censé faire d’après vous ?
    — Tout homme digne de ce nom brûlerait de se venger. Pas vous ?
    — Je… je ne sais pas. Je suis encore sous le choc.
    — Vous m’êtes sympathique, Olivier. Aussi, j’ai envie de vous proposer un marché. Acceptez-le et non seulement je vous débarrasse d’une ingrate, mais je vous garantis de surcroît un succès littéraire colossal.
    — Comment ça ? fis-je avec une pointe de curiosité.
    — Vendez-moi Sophie…
    — Vous êtes malade ! Les êtres humains ne sont pas des marchandises !
    — Dans votre monde, peut-être. Ici, c’est une autre affaire. Et puis ...
    ... n’est-elle pas VOTRE épouse ?
    — Heu… Oui. Mais ça ne me donne aucun droit sur elle !
    — Tss-tss… D’après la loi, les conjoints sont bien censés s’appartenir mutuellement, non ?
    
    Profitant de mon abasourdissement, le petit homme sortit un parchemin de sous sa cape et le posa sur la table. Je lus les premières lignes sans parvenir à y croire. Il s’agissait d’un bail emphytéotique où l’on me proposait, en échange du don « d’inspiration absolue », de céder tous mes droits sur Sophie pour une durée de 99 ans. Le document était pré rempli avec mes noms, qualités et adresses : Olivier Carkanpois, écrivain, 15 rue des Abbesses à Chalon. De son côté, Konstantinos avait indiqué en guise de domicile « Île de nulle part ».
    
    — Je suis en mesure de faire de vous l’égal des Flaubert, des Faulkner, des Dumas. Et même mieux !
    — Mais qui diable êtes-vous donc ?
    — « Le diable, c’est que la vertu soit si régulièrement punie. Ainsi va le monde des forces ! », déclama Konstantinos avant d’éclater de rire.
    
    D’un geste de prestidigitateur, il fit apparaître une plume d’oie qu’il me tendit avec emphase.
    
    — Si Monsieur veut bien se donner la peine.
    — Attendez ! Je ne peux pas faire ça sans réfléchir…
    — C’est la chance de votre vie, Olivier ! Vous ne voudriez pas la gâcher pour une putain qui vend son corps au premier venu ?
    — Qu’adviendra-t-il de Sophie, si je signe ce document ?
    — Soyez rassuré, elle ne sera pas malheureuse ; j’userai d’elle tel un bon mari, selon mes envies.
    — Non, je ...
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