Fin du monde sur canapé
Datte: 03/06/2020,
Catégories:
sf,
Auteur: Hidden Side, Source: Revebebe
... convaincu son épouse. Certes, le pavillon des Keller avait besoin d’un bon ravalement mais, pour un prix ridicule, ils acquéraient en prime un abri antiatomique à l’espace de vie exceptionnel. Bien que souterraine, l’installation présentait des possibilités d’aménagement quasi infinies. Alain parapha chaque page du compromis de vente à la suite d’Élodie. Il était impatient de commencer les travaux, tant dans la villa que dans l’abri. Peut-être plus impatient encore en ce qui concernait l’aménagement de ce dernier.
Sa femme et lui en avaient parlé toute la semaine. Ils avaient même rencontré un architecte d’intérieur, avec les plans fournis par l’agence. Chaque membre de la famille avait apporté sa pierre au projet, selon ses envies. Au premier niveau, une salle de gym serait aménagée dans une partie du salon, avec plancher en hêtre blond et miroirs muraux. Élodie avait prévu les appareils de musculation les plus avancés, dont une bicyclette stationnaire dotée d’un programme d’entraînement par immersion visuelle. Au niveau inférieur, Alain avait envisagé d’abattre une ou deux cloisons pour installer sa salle Home Cinéma, avec six véritables fauteuils de cinoche, ampli-son en 7. 1 et format d’image 2. 35 extra large. Quitte à être sous terre, autant en profiter ! Enfin, pour Manon, l’une des chambres serait reconvertie en salle de jeu idéale, version Disney.
Au bout de trois mois, les Durieux avaient déménagé dans le pavillon des Suisses. La salle de gym futuriste était ...
... passée du stade de l’épure à celui de réalité tangible. Par contre, le projet Home Cinéma allait être encore à la traîne un bout de temps, vu l’état actuel de leurs finances. Alain se consolait en voyant ce délai supplémentaire comme l’occasion de s’équiper d’une chaîne de traitement audio/vidéo compatible avec les tout derniers standards HD.
Les semaines passant, ils avaient pris de nouvelles habitudes. L’abri était devenu le point focal de leurs moments de loisir, et ce n’était pas simplement en raison du nombre d’heures consacrées à son aménagement. Bien qu’ils ne se l’avouassent pas consciemment, c’était bien plus que cela. Dans cet espace clos et inviolable, ils avaient enfin l’occasion de construire leur version d’un univers idéal, un cocon dans lequel ils pouvaient oublier le reste du monde pour quelques heures, une nuit, le temps d’un week-end.
Alain et Élodie ne semblaient pas se rendre compte que leur réseau relationnel se désagrégeait à toute vitesse. Passées les premières semaines d’enthousiasme, les amis et la famille avaient compris la nature profonde de la transformation à l’œuvre chez les Durieux. Ils recevaient de moins en moins souvent de leurs nouvelles, Élodie et Alain n’étant plus jamais disponibles pour les activités typiques de l’homo sapiens épanoui : après-midi shopping, sorties resto et ciné, virées du week-end. Même les sacro-saintes vacances en famille étaient passées à la trappe. Un peu comme si le couple et leur fille avaient disparu de la ...