1. Le noir à la puissance noire


    Datte: 24/05/2020, Catégories: collection, nonéro, confession, mélo, portrait, Auteur: Catherine, Source: Revebebe

    ... dans l’armée. En clair, il a déroulé du câble, et ce n’est certainement pas cet emploi à la police municipale qui va lui faire peur !
    
    Pourtant, ce soir-là, la forteresse est ébranlée. Je vois dans son regard une fureur inconnue à ce jour et qui ne demande qu’à exploser, doublée d’un profond désespoir. Je l’interroge ; il ne veut rien dire. Il n’est pas du genre à s’épancher. Ce n’est que quelques mois plus tard que je connaîtrai le fin fond de l’histoire.
    
    Il est aux alentours de six heures ce soir-là lorsqu’une gamine d’environ dix ans se pointe à la permanence de la Police Municipale. D’origine marocaine, ses longs cheveux impeccablement tressés, la petite serait plutôt mignonne si elle n’avait pas un œil poché et la lèvre ouverte.
    
    — Mais qui t’a fait ça ?
    — Mon père… Il n’arrête pas de me taper dessus… Je ne veux pas retourner chez moi…
    — Et ta maîtresse ? Elle ne dit rien ?
    — Elle a déjà téléphone aux flics et à l’assistante sociale… Ils déboulent, ne font rien et après c’est moi qui trinque… Gardez-moi avec vous, Monsieur…
    
    Évidemment, je passe sur le flot de larmes de la mouflette… Coup de fil au père qui ne répond pas, visite des condés municipaux au domicile : personne. Par contre, l’enquête de voisinage confirme les dires de la petite mais, étrangement, rien n’a jamais été fait.
    
    Dès lors, que faire ? Renvoyer la mioche chez son paternel ? Non. Par contre, passer par l’hôpital pour que des constatations soient faites, c’est possible. Et après ? ...
    ... Impossible de l’hospitaliser, son cas n’est pas assez grave… Eh oui, parce qu’en droit français, la seule personne habilitée à placer en urgence un enfant est le procureur de la République. Or, cela tombe bien : le beauf et le proc s’entendent bien, au point d’avoir leur numéro de portable personnels.
    
    Seulement, proc ou pas proc, on a le droit d’avoir une vie personnelle, et ce jour-là notre homme fait du squash. Son portable sonne, sonne, sonne encore mais ne répond pas. Que faire ? Emmener la gamine chez lui ? Là encore, c’est risqué : si le type porte plainte, le beauf aura tout gagné. Et pour bien qu’il invente quelques pseudos-actes pédophiles, alors là, ce serait la cerise sur le gâteau, quand bien même l’enquête ultérieure prouverait par A + B que tout est bidon. Salissez, salissez, il en restera toujours quelque chose.
    
    19 heures arrivent, et là il ne reste plus qu’une solution : la confier à la police nationale qui, elle, a la possibilité de garder la petite le temps que son père vienne la chercher et que quelques questions concernant ses actes lui soient posées. Seulement, ça, c’est si monsieur le commissaire est d’accord…
    
    19 h 10 : le procureur rappelle. Vu le cas, bien sûr qu’il est d’accord pour placer la petite, c’est évident ! Et où est-elle ? Eh bien, au commissariat… Eh bien non, la gamine n’est plus au commissariat puisque les condés ont eu l’idée géniale de la reconduire chez son paternel, et ce malgré le casier qu’il trimbale ! Grande idée…
    
    Tellement ...