1. La collègue est morte


    Datte: 07/04/2020, Catégories: nonéro, Auteur: Lilas, Source: Revebebe

    ... lentement, de sa curieuse voix rauque et un peu cassée. C’est l’heure de l’accident ?
    
    Les inspecteurs échangèrent un coup d’œil.
    
    — Oui, affirma l’autre. Vous ne vous souvenez pas ?
    — Non. Avant l’accident, j’étais à la bibliothèque municipale.
    — Vous travaillez là-bas, c’est cela ?
    — Oui, je suis bibliothécaire.
    — Vous êtes sortie très exactement à… (l’inspecteur lança un regard sur une feuille, posée devant lui sur le bureau) dix heures moins dix. Pour quelle raison ?
    
    Mina soutint sans sourciller leurs regards inquisiteurs.
    
    — Comment pouvez-vous savoir l’heure à laquelle j’ai quitté mon travail avec autant de précision ? éluda-t-elle.
    
    Les policiers se regardèrent à nouveau.
    
    — Nous avons posé quelques questions à votre collègue, monsieur Didier, répondit le premier inspecteur qui lui avait adressé la parole. (Une pause) Vous ne voulez pas répondre à nos questions ?
    
    Les mains de Mina se crispèrent sur la bride de son sac.
    
    — Si. Ce n’est pas ce que j’ai voulu dire. Je me demandais, c’est tout.
    
    Après une courte pause, l’autre policier reprit la parole, visiblement agacé.
    
    — Reprenons. Pourquoi êtes-vous partie si tôt de votre travail, madame Hendrowks ?
    
    Il y eut l’ébauche d’un sourire sur le visage las de Mina.
    
    — Martin Didier a dû vous le dire, souligna-t-elle. C’est un maniaque de première classe, il remarque le moindre de mes faits et gestes.
    — Madame Hendrowks… commença un policier, d’un air réprobateur.
    — D’accord, coupa Mina. On ...
    ... est vendredi aujourd’hui. Je finis toujours à dix heures le vendredi. J’allais faire mes courses.
    — Que s’est-il passé, madame Hendrowks ?
    — Je… suis allée jusqu’à ma voiture (Mina serra convulsivement ses doigts autour de son sac). J’ai démarré et j’ai commencé à descendre la rue.
    
    Elle s’arrêta.
    
    Les inspecteurs se penchèrent vers elle comme un seul homme.
    
    — Et après madame Hendrowks ? Que s’est-il passé ?
    
    Elle garda le silence, les yeux baissés sur ses mains.
    
    — Madame Hendrowks ?
    
    Elle soupira. Le chagrin et le remords creusaient son visage. Le visage de quelqu’un qui a la mort sur la conscience.
    
    — La rue était en pente, vous comprenez, dit soudain Mina, d’une voix brisée. (Ils virent que ses yeux étaient remplis de larmes.) Forcément, la voiture a accéléré. Il n’y a pas de passage piéton à cet endroit et les trottoirs étaient quasiment déserts. Je faisais attention, mais j’ai cru… j’ai cru que… vous comprenez, j’ai accéléré…
    — Oui, oui, nous comprenons, intervint un policier d’une voix apaisante. Personne ne dit que vous êtes responsable, madame Hendrowks…
    
    Elle hocha la tête, les yeux clos.
    
    — Soudain, j’ai vu une silhouette sur le bord de la route, poursuivit-elle. J’ai cru qu’elle n’allait pas traverser, évidemment, j’allais vite… Personne n’aurait traversé devant une voiture, n’est-ce pas ? … On aurait dit qu’elle attendait que je passe pour… pour mettre les pieds sur la chaussée. Oh mon Dieu… je ne voulais pas… j’ai freiné, j’ai freiné très ...
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