Vraimodo
Datte: 28/12/2019,
Catégories:
fh,
amour,
Auteur: Guust, Source: Revebebe
... mais toute laideur est relative. Comparée à moi, Yolande est merveilleusement belle. Elle n’a pas la sveltesse de sa sœur Brigitte. Elle est un peu potelée, avec un visage arrondi, mais ses proportions sont agréables. Ses cheveux clairs et lisses tombent sur ses épaules, et sa peau laiteuse contraste étrangement avec le vert sombre de la robe légère qui la revêt jusqu’au-dessus des genoux. Elle est pieds nus dans des sandales dorées à talons plats. Il fait chaud. Bien plus chaud que chez moi.
— Fait-il assez clair ? Je peux vous faire plus de lumière.
— C’est très bien comme ça, dis-je.
Je ne distingue pas tout en détail, mais du côté où nous nous trouvons, hormis le salon de type « 3+2 » et la table basse, sont disposés des haut-parleurs et une armoire équipée d’une chaîne haute-fidélité, ainsi que des étagères chargées de disques – compacts et microsillons. Mais c’est l’autre côté de cette vaste pièce qui impressionne le plus, car elle est occupée par toute une collection d’instruments de musique, au centre desquels un piano à queue, que voisinent un orgue de jazz – un Hammond à double clavier – deux guitares classiques sur leur support, et, de ci de là, divers coffrets à instruments. Aux murs sont accrochés quelques pièces de collection : vieilles guitares et mandolines, une cornemuse, et ce qui doit être probablement un luth…
Yolande perçoit mon attitude et devine, à mon silence, que j’observe ce qui m’entoure.
— Comment trouvez-vous mon salon ?
— ...
... Excusez-moi… je ne voulais pas en dresser l’inventaire. Je suis sans doute indiscret.
— Pas le moins du monde.
— C’est fascinant. Vous… vous jouez de tous ces instruments ?
— Quelques-uns, seulement. Mais je les aime tous. J’aime les toucher, les entendre, sentir leurs vibrations, humer leurs odeurs. Pour moi, ils sont presque vivants.
Yolande se meut avec aisance, pose en passant les mains sur les meubles, sur les objets familiers.
— Ici, c’est mon royaume, dit-elle en s’arrêtant près du piano. Je n’ai besoin de personne pour m’y diriger, tant qu’on ne déplace pas les meubles à mon insu.
Je vois ses doigts caresser le bois du piano.
— Venez. N’ayez crainte.
Je m’avance vers elle. J’éprouve une sensation bizarre. J’ai beau savoir que Yolande ne me voit pas, je sais qu’elle peut situer sans problème l’endroit où je me trouve, identifier mes déplacements, mes mouvements. Dès que j’arrive près d’elle, elle lève la main, la pose sur ma poitrine.
— Je suis heureuse que vous soyez venu.
— Pourquoi ?
Ce n’est pas très malin de lui demander ça, mais je n’ai pas pu m’en empêcher.
— Je ne sais pas… Ma réponse doit vous sembler idiote, non ?
— Ma question était idiote.
— Pas du tout.
— Vous vous sentez seule, peut-être ?
— Parfois, oui. Ma sœur est partie ce matin, avec son mari, et elle ne rentrera pas avant ce soir. C’est un dimanche très calme, après le concert d’hier. Et vous ? Vous vous sentez seul, parfois ?
— Pas parfois. Souvent.
— C’est vrai. Vous me ...