1. Papyrus


    Datte: 22/03/2018, Catégories: nonéro, Auteur: HugoH, Source: Revebebe

    ... d’une formule en Latin, Ab Irato ou Da Capo, ce genre de choses. C’est devenu un jeu. On a mangé quelques fois ensemble quand je n’étais pas avec l’équipe informatique. On a sympathisé. Et puis un jour, il m’a demandé de l’aider à créer un site pour diffuser des poèmes. Je crois que personne ici ne savait qu’il écrivait. Je sais qu’il passait pour un mec associable et étrange. Ça me gênait un peu parce qu’on ne se connaissait pas bien et que ses textes qu’il était en train de me faire lire, je ne trouvais pas ça bien. Pas du tout. Trop sombre, trop intérieur, trop personnel. Ça me faisait chier. Mais allez dire ça à quelqu’un. De la poésie au vingt et unième siècle, il faut quand même avoir de la suite dans les idées. Trop sombre vraiment. Ambigu, cruel. Ces histoires de double, ça me mettait mal à l’aise. Je lui ai dit que c’était pas mal mais que je manquais de temps. Ensuite, il m’a tanné des jours et des jours. Jusqu’à ce que je finisse par céder. Il voulait quelque chose de bien. Il était prêt à me donner de l’argent. Mais j’ai refusé, c’était pas grand-chose à faire. On a bossé quelques heures et le site était prêt. Sobre, sombre. Noir, blanc, de légères teintes grises. On l’a agrémenté de photos qu’il avait prises. Il était enthousiaste. Vraiment. Ça faisait plaisir à voir. Surtout qu’un site de poésie qui n’allait être visité que par sa famille et encore, il n’y avait pas de quoi sabrer le champagne. Mais bon, j’avais rendu service. Le type était attachant. Ça me ...
    ... suffisait. S’il s’y retrouvait avec ses vers sordides, ça le regardait. Il m’avait demandé de lui ajouter une page contact pour que ceux qui passaient sur son site et qui en avaient envie puissent lui envoyer des messages sur sa boîte. Il était nerveux. De temps en temps, il venait me demander un renseignement sur une mise en ligne, sur un code HTML.
    
    Et puis il a reçu ce mail. Il me l’a fait lire. Il avait sollicité l’avis des gens qui pourraient échouer sur son site, il n’a pas été déçu. C’était terrible. Bien formulé. Plutôt fin. Et c’était ce qui était le plus terrible, la critique avait du sens et malgré sa violence, elle touchait juste. Lucas a renvoyé un mail pour savoir qui était la personne qui avait écrit ça. Mais il n’y a pas eu de réponse. On a fait le rapprochement avec les passages notifiés sur le tracker. Il y avait cette adresse IP qui revenait, toujours la même. Il me disait : Ce mec me connaît. Non seulement sa chronique est juste mais en plus il n’a pu trouver le site qu’en tapant mon nom.La personne utilisait un proxy distant comme le font les entreprises par sécurité. Comme notre boîte pouvait le faire. J’ai trouvé le proxy en question, j’ai compris que ça venait de chez nous. Ça avait du sens. Il suffisait qu’un connard des plateaux ait trouvé le site pour qu’il ait envie de s’amuser. Le problème, m’a dit Lucas, le problème c’est que je ne vois pas qui pourrait écrire aussi bien et aussi juste. Il était sacrément nerveux. Tu ne connais pas tout le monde, ...
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