1. Maurice et Marcel


    Datte: 21/03/2018, Catégories: hh, copains, vacances, bain, bateau, amour, cérébral, historique, Auteur: Claude71, Source: Revebebe

    ... manger chaud depuis un bail.
    
    L’après-midi, il faisait doux. Il sortit les chaises pliantes, les fauteuils en osier, les tables en bois, les bancs. Il devait les lessiver et passer un coup de peinture blanche pour redonner un coup de neuf.C’était chiant. Tous les ans, il se faisait la même remarque mais, bosser pour Fifine pendant la saison d’été, c’était, tous comptes faits, bien plus peinard que le service dans les bistrots de Chalon avec des patrons, voire des clients qui vous foutaient la main au cul.
    
    Que des gros dégueulasses qu’en pinçaient pour des p’tits jeunes comme lui, qui profitaient qu’il pouvait rien dire pour le palucher ou le bécoter dans les coins sombres. Ça le f’sait gerber rien que d’y penser. Alors la Fifine, même si elle avait fait la pute dans sa jeunesse, et, surtout pour ça, elle le respectait. Et puis, elle fermait les yeux sur « ses cochonneries » comme elle disait.
    
    Maurice avait vingt-deux ans. Blond, les yeux bleus, le visage fin et presque imberbe, le corps frêle, on lui en donnait à peine dix-huit, dix-neuf. Les occasions de se trouver un mec ne manquaient pas et Fifine laissait faire pourvu que ça ne nuise pas au service. Elle ne tolérait pas, en revanche, qu’on profite de son garçon. Elle y veillait tout particulièrement. Si jamais quelqu’un s’y essayait et que Maurice protestait, elle poussait une gueulante. Le quidam se barrait, la queue entre les jambes. Jamais plus il ne revenait, trop honteux d’avoir été traité de pédale devant ...
    ... toute la compagnie, et par une femme en plus. Ça se savait et les incidents étaient plutôt rares. Bonasse, la Fifine, mais fallait pas l’emmerder.
    
    Il avait bien avancé. Tout le mobilier de terrasse était propre. Il restait encore la peinture mais, pour aujourd’hui, il en avait assez. Il lui tardait d’aller voir son p’tit mec là-haut. Il l’avait négligé et s’en inquiétait maintenant. Marcel était réveillé. Il avait soif. Il ne comprenait pas comment il avait atterri dans ce lit. Il sentit la bouillotte, maintenant froide, sur son ventre. Quelqu’un s’était occupé de lui, sans doute une femme, pour y avoir mis tant de soin. Il essaya d’appeler mais sa voix était trop faible et il n’était pas question de se lever. La tête lui tournait trop. Il se résigna à attendre pour faire la connaissance de sa bonne fée. Maurice entra, sans faire de bruit, dans la chambre. Marcel, étonné, demanda :
    
    — J’suis où ? T’es qui ?
    — Ben, l’est réveillé le p’tit môme ! Moi, c’est Maurice, on m’appelle Momo et toi ?
    — Moi, c’est Marcel. J’ai soif, s’il te plaît.
    — Il reste de la tisane mais elle est froide. Je vais te chercher du bouillon.
    
    Maurice revint rapidement, s’assit sur le bord du lit et fit boire Marcel.
    
    — Merci, t’es gentil. C’est bon. C’est ta mère qui l’a fait ?
    — Non, c’est moi, avec mes p’tites mains. J’suis tout seul ici pour l’instant. Fifine viendra plus tard.
    — C’est qui Fifine ?
    — Joséphine, ma patronne. C’est chez elle, ici. Une guinguette pour les mariniers de ...
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