La forêt
Datte: 30/11/2019,
Catégories:
nonéro,
aventure,
fantastiqu,
sorcelleri,
merveille,
Auteur: Gaed, Source: Revebebe
... l’un de ces milliers d’arbres. Non, je ne peux m’y résoudre et la pierre glisse dans la poche sous mon plastron.Je me redresse, mis à part une légère douleur à l’épaule, je n’ai rien. La chance s’est décidément faite mon alliée, en témoigne la blessure au-dessus de mon cœur. Mes jambes tremblent légèrement, la tête me tourne encore. Je cherche du regard ma monture, mais je ne vois rien d’autre que la brume maintenant épaisse. À tâtons, l’épée dégainée du fourreau pendu à mon dos, je balaie le sol d’un large mouvement circulaire. La lame va-et-vient dans la nuit.J’ai touché quelque chose.Là, à mes pieds.Le cheval gît, encore tiède. La tête est complètement retournée, les yeux grands ouverts fixent le ciel, deux minces filets de sang s’en écoulent doucement comme des traînées de larmes, jusqu’aux nasaux. Je m’agenouille et me signe de la croix. C’est chose rare que de prononcer les paroles sacrées devant une simple bête pourtant, par Lazarre, il s’agit d’une forme d’instinct qui me pousse à m’exécuter. À la vérité, il s’agit avant tout de me rassurer.Qui a bien pu faire ça ?Le craquement, le craquement que j’ai entendu un peu plus tôt lorsque je suis tombé à terre. C’est un endroit maudit, c’est certain. La forêt muette recèle bien des énigmes dont je n’ai pas envie de me préoccuper. Il faut me hâter, quitter cette folie au plus vite. Le souvenir du rêve de la vieille femme me revient en mémoire. Sa voix rauque croise celle du chat aux yeux de sang :Descends le fleuve, ...
... descends-le…Qu’est ce que cela veut dire ? Quel fleuve ? Pourquoi m’indiquer ce chemin ? Quels démons habitent ces lieux ?Je glisse mon fourreau en bandoulière et pose mon sac sur mon dos, mieux vaut garder l’épée à la main, le lieu n’est pas sûr. Je souris presque de cette dernière pensée, j’ai découvert bien d’étranges choses dans ma vie, de celles qu’un moine et un soldat peuvent rencontrer, mais jamais je n’ai vu pareil endroit.VI
Les deux autres ont disparu.
J’avancerai seul, c’est mieux ainsi.
Je devrais être habitué.
Marcher.
Marcher dans des sous-bois humides, les bottes dans la boue parfois jusqu’aux genoux et nos souffles qui se mêlent, nos gémissements lorsque les plaques des armures s’enfoncent dans nos chairs. Chaque pas est un combat bien pire encore que celui vers lequel nous avançons tous, têtes baissées, troupes soumises.
Sous des arbres étouffants de moisissure, sur des plaines gelées, cernées d’un brouillard blafard. L’air froid qui cingle la peau comme autant de petites lames, figeant nos bouches, nos cheveux sales et ce maudit vent glacial qui n’en finit pas la nuit venue de libérer nos puanteurs prisonnières des plastrons et des plaques de métal.
Les souvenirs, les sensations.
Nous allons ainsi, le front bas, vers la guerre. Le chant des suiveurs nous traque sans répit. Ces longues litanies lugubres qui nous poussent toujours plus loin, cohorte de loqueteux prêts au sacrifice. Ne pas s’arrêter, ne pas céder, tenir encore et encore, ...