1. Mise en boîte


    Datte: 19/03/2018, Catégories: fh, jeunes, inconnu, pénétratio, init, Humour Auteur: OlivierK, Source: Revebebe

    ... la boîte quand la famille avait le dos tourné, juste avant qu’on visse le couvercle. La chemise aussi, tiens, j’y pense !
    
    Elle se fout de moi. Je lui revaudrai ça un jour. En attendant, je chevauche ma moto et en route. Je suis l’auxiliaire de la Faucheuse, place, mortels, ôtez-vous de mon chemin ! Un fourgon parme et noir est garé rue Pasteur, avec un collègue qui glande au volant.
    
    — Sylvie m’a envoyé ici.
    — Ah ! T’es nouveau dans la boîte. Monte aider les autres.
    
    J’obtempère. Dans le salon du second, des gens à la mine sévère me montrent du menton une porte fermée. Je pénètre. Je vois trois hommes dont un mort, que les vivants sont en train d’installer sur un drap blanc. Le défunt est en costume gris, le visage serein. Je chuchote aux vivants que je suis nouveau dans la boîte. L’un d’eux me répond à voix haute de brancher le frigo, en me montrant du pied une prise de courant, sous le corps. Je comprends qu’on a disposé sous le bonhomme un appareil générant du froid, pour combattre les effets de la décomposition. Je n’ai pas lu Cioran mais je n’ignore pas que les morts sentent facilement mauvais, au bout d’un certain temps.
    
    Le collègue à lunettes fait les poches du de cujus.
    
    — Les proches n’osent jamais les fouiller. Celui-ci est mort tout habillé, prêt à aller au bistrot. On partage.
    
    Il y a quelques billets dans le portefeuille. Je n’ai droit qu’à une part symbolique. Il y a aussi de la monnaie dans les poches de la veste. Le collègue tire sur le menton ...
    ... du gisant, glisse une pièce d’un centime d’euro dans sa bouche en me disant que c’est pour Caron et met le reste dans sa propre poche.
    
    — On le boira tout à l’heure, promet-il.
    
    Et il m’ordonne de faire entrer le public. J’ouvre la porte. La vieille doit être la veuve. Le dadais m’a tout l’air d’être le fils, la blonde gironde, la fille ou la bru. Elle a du chien mais une seule tête. Je la suivrais bien, si je pouvais, après la mise au tombeau du vieux.
    
    Onctueux, le collègue qui n’avait pas encore ouvert la bouche leur dit que nous allons nous retirer, et revenir une heure avant les obsèques, le surlendemain. Entre temps, le cercueil aura été livré.
    
    — Suis-nous, avec ta moto. On prend l’apéro et ensuite on bouffe.
    
    Nous allons vers la boutique, mais ils s’arrêtent avant. Le patron me demande ce que je bois. Pour les autres, il sait. Je dis :
    
    — Une Suze.
    — Une Suzette pour le jeune homme, hurle-t-il. Et les autres de s’esclaffer, sauf l’intello à lunettes, qui me demande mon nom et mes diplômes.
    — Ah ! Une licence de lettres modernes ! Tu passeras maître de cérémonie, un jour. Ou tu remplaceras Serge, tu recevras les clients. Tu leur fourgueras les cercueils les plus chers, ça te fera une prime. Cet après-midi, tu seras arrière droit. Tu régleras ton pas sur celui de Tintin. Tu tâcheras de ne pas trébucher. Une boîte qui s’ouvre sur le parvis, ça peut réveiller son contenu. Alors, imagine la tête des héritiers ! Le père Martineau était un notable. Conseiller ...
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