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Le baquet
Datte: 26/12/2025, Catégories: #historique, #romantisme, fh, Auteur: Patrik, Source: Revebebe
... Madame, j’ai à vous parler. Sans répondre, elle obéit. Elle me regarde d’un air étrange, mélange de crainte, de surprise et d’incompréhension. Je crois néanmoins déceler quelque chose en plus dans ses yeux. Je l’entraîne à l’écart dans les bosquets, je ne veux pas qu’il y ait d’oreille indiscrète, ce que j’ai à reprocher à cette inconstante ne concerne que nous deux : — Je constate avec déplaisir que je ne pouvais pas avoir confiance en vous, Madame ! Vos propres enfants aussi ! — Vous vous méprenez, Monsieur ! Je partais juste faire une petite retraite pour mieux tourner la page. — Dans ce cas, pourquoi n’en avoir rien dit ? Anne-Louise baisse la tête : — J’ai eu peur que vous m’en empêchiez… — Si vous m’en aviez parlé sereinement, j’aurais pu comprendre. Timidement, elle lève le nez vers moi : — Ce n’est pas évident. Même si mon mari était un faquin, il était néanmoins mon mari et le père de mes enfants. Et c’est vous qui l’avez… Ce satané mari reste aussi embêtant mort que vivant, ainsi que le poids des convenances. La jeune femme se tord ses mains : — Je dois expier pour notre bien à tous… — Foin de tout ceci ! Vos enfants ont besoin de vous ! Je marque une très courte pause, puis j’enchaîne : — Et moi aussi, j’ai besoin de vous, Anne-Louise ! Interloquée, elle me regarde : — Vous venez de dire quoi ? — Vous avez très bien entendu. Moi aussi, je me suis bien entendu dire ce genre de chose, je suis tout aussi étonné qu’elle. En ...
... vérité, à bien y réfléchir, je pense que je me suis fait avoir en douceur. Alors que ce n’était pas dans mes intentions initiales, j’ai développé des sentiments envers Anne-Louise. Peut-être même que j’ai inconsciemment occis son mari pour m’accaparer de sa jeune personne. — Et… il y a longtemps, Monsieur ? — À vous dire la stricte vérité, je viens de m’en rendre compte maintenant, dans la crainte de vous perdre. Mais je pense que… c’était déjà en moi depuis un certain temps… Elle baisse à nouveau la tête, en murmurant : — Tout comme moi… Fébrile, je capture ses mains : — Vous venez de dire quoi ? — Vous avez très bien entendu. Je souris : — C’est de bonne guerre, Anne-Louise. Bon, je crois que nous avons assez perdu de temps comme ça. — Que voulez-vous dire ? Il y a quelques années, quand je me suis retrouvé fiancé à une jeunette inconnue qui est devenue ensuite ma femme, puis la mère de mes enfants, je me suis dit qu’il fallait que j’essaye de mettre toutes les chances de mon côté, même si cette demoiselle fraîchement sortie du couvent m’était imposée. J’aurais pu, comme tant d’autres de mon rang, me contenter de lui faire des enfants et de batifoler ailleurs, mais je crois savoir que Dieu n’aime pas trop ce genre de comportement. Et s’il existe un moyen de transformer une contrainte en agrément, je serais idiot de ne pas tenter ma chance. Je suis aujourd’hui dans les mêmes dispositions. Si ça m’a réussi une fois, pourquoi pas deux ? Je la ...