1. Hallucination - Billevesée et Gaudriole !


    Datte: 24/09/2019, Catégories: fh, fff, confession, fantastiqu, sorcelleri, fantastiq, Auteur: Laure Topigne, Source: Revebebe

    ... petit cortège me conduisit vers ces places d’honneur tandis que sur l’autre rive s’approchait également l’escorte d’une prêtresse qui portait un long manteau étincelant à la lueur des flammèches ivres comme s’il avait été incrusté de pierreries. Dès que nous fûmes installés, un silence très relatif s’établit. On jeta des bottes de foin qui avaient macéré dans du salpêtre sur les feux qui nous enserraient. La nuit s’illumina et des fétus de paille embrasés se dispersèrent dans l’air en crépitant où je les vis distinctement se transformer en sorcières chevauchant des balais.
    
    Les ombres loqueteuses retiraient leurs hardes pour accueillir les nouvelles venues et la scène maintenant se remplissait très vite pour compter bientôt plus d’une centaine de personnages. Ma voisine se redressa et, tout en saisissant ma main pour me relever, défit la fibule retenant sa tunique qui glissa sur le sol. Elle apparut entièrement nue à l’exception d’une ceinture métallique à laquelle était pendu un glaive dépourvu de fourreau. Des croissants de lune noirs ornaient le dessous de ses seins lourds et de ténébreuses étoiles parsemaient son ventre et ses cuisses. Elle n’était pas aussi élancée qu’il m’avait d’abord semblé car d’épaisses semelles de bois la rehaussaient et sa dense chevelure châtain, arrangée en haut chignon qui lui tressait un casque, la grandissait. Il s’en échappait une mèche d’argent qui courait sur ses tempes et son cou pour se lover sur son poitrail. Sa peau était ...
    ... somptueusement cuivrée et son épaule gauche se décorait d’une importante tache de vin d’allure reptilienne tandis qu’un énorme grain de beauté représentant un scarabée s’étalait juste à côté de son nombril. Autour de son cou pendait un large collier alternant pierres noires et quelque chose qui ressemblait à des boucles de cheveux.
    
    Et la houle s’enfla, amplifia ce nom mille fois répété : Hérodiade, roulant comme une puissante et obscure vague, comme une clameur implorante. La foule des sorcières totalement dénudées s’était resserrée autour de nous et je pouvais clairement les distinguer. Je fus étonné de constater qu’elles étaient soit juvéniles, soit âgées mais que n’y figurait pas l’âge intermédiaire. Je fus encore plus stupéfait de découvrir que, si sous leurs oripeaux, jeunes ou vieilles, elles paraissaient laides et repoussantes, elles étaient présentement dans l’éclairage fauve des torchères, sans exception, belles et attirantes. Leurs hanches, leurs ventres et leurs seins étaient replets mais sans démesure, simplement gonflés de vie et prometteurs de fertilité. Mais surtout elles affichaient en leurs traits une formidable détente, les liesses d’une paix intérieure et la joie d’une sensualité émancipée. J’y vis ces Ève qui, tant de fois, avaient inspiré et gouverné ma main de peintre, se gaussant d’un péché dont on souhaitait faire le prix de leurs ivresses.
    
    Celle, que désormais j’appellerai Hérodiade, leva son bras pour intimer le silence :
    
    — Maintenant que nous voici ...
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