La révolte des démunis
Datte: 05/08/2025,
Catégories:
sales,
nonéro,
mélo,
portrait,
Auteur: Melle Mélina, Source: Revebebe
... cabine faite de bric et de broc, de cartons et de vieilles couvertures. Mais elle n’y était pas. La nonne la chercha dans les coins qu’elle lui connaissait. Devant « Sa » banque, devant le supermarché. La religieuse alla chez les flics, puis à l’hôpital. Elle alla aux Restos du Cœur, elle alla chez Emmaüs. C’est finalement lorsqu’on arrête de chercher que l’on trouve.
Elle et son chien faisaient la manche devant une boulangerie en centre-ville. Comme de bien entendu, elle était trempée et les conditions horribles l’avaient fait se vieillir encore de deux ou trois années en l’espace d’une petite semaine. Elle accueillit la sœur de la sorte :
— Eh, Marie ! Comment vas-tu ? N’aie crainte, je ne pue pas, je me suis douchée… avec toute cette drache !
Marie-Thérèse avait besoin d’être rassurée, elle avait besoin d’entendre qu’Alice allait bien malgré les conditions météo. Elle lui répondait comme si son interlocutrice n’existait pas ou peu. Marie-Thérèse se demanda si elle était invisible à ses yeux. C’était très ironique, à force d’être invisible pour les gens, elle leur rendait la pareille ! Tout en lui parlant, elle interpellait des badauds :
— Bonjour…
Pas de réponse. La femme avait juste accéléré sa marche. Un couple fit un large crochet pour éviter de passer à sa portée.
— Regarde, lui dit-elle, regarde bien cette pétasse-là, lui désignant d’un simple mouvement de tête un p’tit bout de femme tout endimanchée qui marchait dans leur direction. Regarde bien son ...
... cinéma, elle traverse la route et tu verras, une fois qu’elle nous aura dépassées, elle va de nouveau traverser la route et rejoindre notre trottoir. Tu as vu ?
Un autre passant : elle lui adressa un sourire et lui dit bonjour. Il ne répondit pas. Elle l’interpella :
— Eh, ça t’écorcherait la gueule de me dire bonjour ?
L’homme baissa les yeux et doubla son allure. Une fois qu’il fut éloigné, elle regarda la religieuse, fière de sa démonstration, un sourire aux lèvres.
Invisible.
Cela faisait maintenant près d’une heure que la sœur lui tenait compagnie lorsqu’un jeune sans-abri vint les rejoindre.
— Désolée, Marie-Thérèse, c’est pas qu’tu m’ennuies, mais mon copain vient de me rejoindre.
Elle vit à sa mine une interrogation et répondit avant que la sœur demande quoi que ce soit :
— Ouais, il est plus jeune que moi, mais qu’est-ce que tu veux, je préfère me taper un p’tit jeune plutôt que les débris de mon âge ! Ça te choque ? Mais qu’est-ce que tu crois ? Que j’ai pas besoin de baiser ? J’suis comme tout le monde, tu sais !
La voyant un peu interdite, elle ajouta :
— Ouaip ! Comme tout le monde ! Je ne sais pas comment tu fais ! Il faut avoir une sacrée bonne raison pour se refuser ces plaisirs ! On ne devient pas bonne sœur par envie, quand même ? dit-elle, un peu blessante.
Sœur Maire-Thérèse ne pouvait comprendre ce besoin de chair et de communion des corps… Comment aurait-elle pu deviner qu’en se sentant remplie, littéralement parlant, la ...