1. Le grand appartement


    Datte: 17/06/2025, Catégories: fh, fplusag, douche, extraconj, diffage, Auteur: Amateur de Blues, Source: Revebebe

    ... donner l’impression qu’il se passait quelque chose. C’était une dame d’une cinquantaine d’années, visiblement une bourgeoise des étages inférieurs, grande et mince. Elle sursauta d’abord à l’arrivée bruyante d’Antoine dans le couloir d’entrée, puis elle lui sourit. Enfin, il imagina qu’elle souriait car le masque ne laissait voir de son visage que de grands yeux clairs, mais ces yeux, fatigués et ternes l’instant d’avant, s’éclairèrent aussitôt quand ils croisèrent son regard.
    
    — Bonjour, Madame, dit-il aussitôt car il ne voulait effrayer personne, et puis sa mère lui avait appris à être poli.
    — Jeune homme, répondit-elle en hochant la tête. Nous ne nous connaissons pas, il me semble, vous habitez l’immeuble ?
    — Oui, depuis le mois d’octobre. Vous savez, les petites chambres tout en haut.
    — Ah, c’est vrai, on m’en a parlé. Cela ne doit pas être drôle avec ce confinement, je suppose. Vous êtes étudiant ?
    — Oui, Madame, en histoire, quand je pouvais étudier.
    — C’est vrai… Comment faites-vous, alors ?
    — Pourquoi Madame ?
    — Je ne sais pas, pour étudier, pour vous occuper, par exemple. On m’a dit que ces chambres là-haut étaient si petites.
    — Oh, c’est pire que ce que vous imaginez. Et vous voyez comment je m’occupe, je descends l’escalier en courant.
    — C’est merveilleux la jeunesse, dit-elle en riant derrière son masque. Mais vous devez trouver les journées bien longues. Vous savez, je m’ennuie plutôt moi aussi, bien que j’ai un grand appartement. Venez donc prendre le ...
    ... thé cet après-midi, j’habite au troisième, Madame Azoulay. Nous parlerons d’Histoire, si vous voulez bien.
    — Oh super ! Volontiers ! Enfin, j’ai un but dans la vie : prendre le thé au troisième étage. Bon, je vais acheter des allumettes. J’ai une autorisation pour ça. Je ne fume pas et j’ai une plaque électrique mais c’est ce que j’ai trouvé de moins cher pour avoir une autorisation de sortie. À plus tard, alors.
    
    Et il s’éloigna dans le couloir, tandis qu’elle le suivait des yeux. Ce jeune homme est la vie même, pensait-elle.
    
    Antoine n’était jamais entré dans un tel appartement. Chez lui, il n’y avait pas de tableaux au mur, ni de vieilles assiettes dans des vitrines ou de canapé en cuir de buffle. Il n’était pas impressionné mais plutôt dérouté, ne se sentant pas à sa place et ayant envie de partir dès qu’il était entré. Pourtant, son hôte était charmante, simple, et sa conversation plutôt intéressante. Sans masque, elle avait des traits de beauté classique et il se dit qu’elle avait peut-être été mannequin quand elle était jeune. Son sourire illuminait la pièce, il devait le reconnaître et il essayait d’oublier l’impression que lui faisait le décor.
    
    Ils parlèrent d’Histoire. Antoine dut expliquer l’idée de son mémoire qui était de retrouver quand et comment l’économie avait pris une place centrale dans le monde moderne. Il étudiait les discours des philosophes et des hommes politiques du XIXe siècle et du début du XXe pour comprendre comment les décisions avaient ...
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